Première partie.
L'affirmation de la responsabilité des
États membres.
8.- La protection des droits fondamentaux des particuliers
s'impose dans les Traités de l'Union européenne aussi bien que la
Convention européenne des droits de l'Homme (CEDH). Cette protection ne
peut être assurée que par une garantie judiciaire efficace et une
réparation adéquate des dommages causés en la violation du
droit communautaire par les États membres.
9.- Le fondement du principe de la responsabilité des
États membres en droit communautaire (Chapitre Ier ) a
justifié les applications jurisprudentielles faites par la Cour de
justice des Communautés européennes (Chapitre II).
Chapitre Ier.
Le fondement de la responsabilité des
États membres en droit communautaire.
10.- Pour justifier l'engagement de la responsabilité
des États membres en cas de violation du droit communautaire, la Cour de
justice des Communautés européennes se fonde sur la
primauté du droit communautaire (Section Ière) et l'obligation de
la coopération loyale issue de l'article 10 du Traité CE (Section
II).
Section Ière.
La primauté du droit communautaire.
11.- Le principe de la primauté du droit communautaire
(A) assure l'application uniforme du droit communautaire par les États
membres et la protection des droits conférés aux particuliers par
le droit communautaire. La responsabilité des États membres
constitue un moyen de la mise en oeuvre de la primauté du droit
communautaire (B).
A. Le principe de la primauté du droit
communautaire.
12.- Dans le système juridique communautaire, le
principe de la primauté du droit communautaire est une garantie de
l'application uniforme du droit communautaire par les États membres. Mme
Chahira Boutayeb le définit qu « 'en cas de conflit avec une norme
interne, le droit communautaire prévaut, bénéficiant d'une
place supérieure sans aucune réserve »12.
13.- La Cour de justice des Communautés
européennes a souligné, dans la célèbre l'affaire
Costa c/ E.N.E.L., « qu'issu d'une source autonome, le droit
communautaire ne pourrait donc, en raison de sa nature spécifique
originale, se voir judiciairement opposer un texte quel qu'il soit, sans perdre
son caractère communautaire et sans que soit mise en cause la base
juridique de la Communauté elle-même »13. A cette
époque là, la primauté du droit communautaire ne se
trouvait pas encore expressément consacré dans les
traités.
14.- Sans être mentionné par les traités
fondateurs, ce principe a aujourd'hui un fondement juridique avec le paragraphe
2 du protocole n° 7 annexé au Traité d'Amsterdam du 2
octobre 1997. Ce paragraphe consacre l'acquis communautaire et les «
principes mis au point par la Cour de Justice en ce qui concerne la relation
entre le droit national et le droit communautaire »14.
15.- Selon Mme Chahira Boutayeb, à la
différence du droit international classique, le droit
12 C. BOUTAYEB , Droit européen : Institutions, ordre
juridique, contentieux, op. cit., p. 252.
13 CJCE, 15 juillet 1964, Costa c/ E.N.E.L., aff. 6/64,
Rec. p. 1149, n° 3.
14 V. paragraphe 2 du Protocole sur l'application des principes
de subsidiarité et de proportionnalité du Traité
d'Amsterdam, version publiée Journal officiel n° C 340 du 10
novembre 1997.
communautaire dispose d'un ordre juridique propre qui se
trouve être intégré au système juridique des
États membres, et qui s'impose aux juridictions nationales 15
. La Cour de justice des Communautés européennes a
considéré dans l'arrêt Van Gend en Loos que «
la Communauté constitue un nouvel ordre juridique [...] dont les sujets
sont non seulement les États membres mais également leurs
ressortissants. [...] Le droit communautaire, indépendant de la
législation des États membres, de même qu'il crée
des charges dans le chef des particuliers, est aussi destiné à
engendrer des droits qui entrent dans leur patrimoine juridique
»16.
16.- Dans le but de garantir un fonctionnement dynamique des
règles de la Communauté, le droit communautaire impose aux
États membres d'assurer une application uniforme et correcte au sein du
système interne. Pour la Cour de justice des Communautés
européennes, le droit communautaire peut s'imposer à la
règle du droit interne des États membres, y compris les
dispositions constitutionnelles17.
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