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Le Comité Judiciaire du Conseil Privé de la Reine Elisabeth II d'Angleterre et le Droit Mauricien

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par Parvèz A. C. DOOKHY
Université Paris I Panthéon-Sorbonne - Docteur en Droit 1997
  

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Paragraphe 1. Analyse de la politique des nominations et affectations

Au regard de l?organisation du Comité Judiciaire, la composition de l?institution mérite d?être analysée sous un angle particulier. L?examen des seules règles et pratique des nominations (A) serait incomplet si on ne s?interroge pas sur la composition des formations de jugement surtout à l?égard des pourvois venant de Maurice (B) car le Comité Judiciaire, contrairement à la Cour Suprême des Etats-Unis d?Amérique et le Conseil Constitutionnel français, ne siège pas en assemblée plénière pour rendre une décision, mais en sous- comité ad hoc composé au cas par cas.

A. Les règles et la pratique des nominations

Peu de règles juridiques (a) déterminent les conditions de nomination des membres du Comité Judiciaire429. Le Comité Judiciaire recrute ses membres de la haute magistrature, au sein de laquelle le critère de compétence (b) joue un rôle déterminant.

a. Les règles juridiques relatives à la composition du Comité Judiciaire

Le Comité Judiciaire est composé430 premièrement du Lord-Président du Conseil (Lord-President of the Council) qui a rang d?un ministre d?Etat à la française (senior minister). Le Lord-Président n?est pas un magistrat et n?est pas inamovible. Il est membre du gouvernement britannique et son sort est lié à celui du Cabinet, organe responsable devant le Parlement. Il n?a pas besoin d?être un pair et il ne siège pratiquement pas au Comité Judiciaire bien qu?il préside celui-ci. Sont aussi membres du Comité Judiciaire les anciens Lords- Présidents du Conseil et les Lords judiciaires (Law Lords). Le terme Lords judiciaires désigne les membres juristes de la Chambre des Lords, c'est-à-dire les anciens Lords-Chanceliers (former Lord Chancellors), les Lords-Chefs-Juges

429 Il serait erroné de classer les membres du Comité Judiciaire en groupe de membres nommés et membres de droit tant les Lords-Juges d?Appel sont dans la pratique membres ex officio du Conseil Privé.

430 On est en réalité nommé membre du Conseil Privé (Privy Councillor) et non du Comité Judiciaire. Le Conseil Privé comprend dans les 400 membres. Les membres du Cabinet britannique, les principaux juges, les éminents politiciens, les grandes personnalités du Commonwealth, dont l?ancien Premier ministre de l?île Maurice, Sir Aneerood Jugnauth QC, en sont membres à vie.

Les conseillers privés doivent prêter serment d?allégeance à la Couronne et un serment de conseiller privé. Ils bénéficient du titre de Très Honorable (Right Honourable) et suivent les Chevaliers de l?Ordre de la Jarretière (Knights of the Garter) dans les cérémonies. Mais les Lords judiciaires, en raison de leur dignité, ont préséance sur les chevaliers précités.

à la retraite (Lord Chief Justices in retirement), les Lords d?Appel en Ordinaire (Lords of Appeal in Ordinary) à la retraite et en fonction, le Lord-Chancelier et le Lord-Chef-Juge en fonction431. Les Lords-Juges d?Appel432 (Lord Justices of Appeal) sont aussi membres du Comité Judiciaire mais n?y siègent pratiquement pas. Enfin, les autres membres juristes du Conseil Privé, parmi lesquels un certain nombre de juges et d?anciens juges des Etats du Commonwealth et des juges de la Haute Cour de Justice anglaise, font partie du Comité Judiciaire. Leur nomination au Conseil Privé dépend de la seule discrétion du Souverain.

Toutefois, dans la pratique, l?activité juridictionnelle est exercée principalement par des Lords d?Appel en Ordinaire, c'est-à-dire, le même personnel que celui de la Chambre des Lords. Ceux-ci ne constituent pas a priori un bloc de juges très monolithique. Il est d?une convention constitutionnelle acceptée qu?au moins deux Lords soient écossais433 et qu?un autre au moins provienne de l?Irlande du Nord434. Mais ils constituent néanmoins une petite élite de hauts magistrats435 bien compacte, homogène et soudée436.

Dans des cas exceptionnels, un juge anglais de la Haute Cour de Justice qui est membre du Conseil Privé437 ou un juge du Commonwealth peut s?adjoindre aux Lords pour composer la formation de jugement du Comité Judiciaire. Au temps où le Comité Judiciaire était la juridiction suprême de l?Empire britannique, il était composé régulièrement de hauts magistrats du Canada, de l?Afrique du Sud, de l?Australie de la Nouvelle-Zélande et de l?Inde. Aujourd?hui, seules la Nouvelle-Zélande, les Bahamas et la Jamaïque y sont, peut-on dire, représentées438. Il est regrettable que l?île Maurice soit toujours tenue à l?écart quant à sa représentation alors que cinq anciens Chefs-Juges de la Cour Suprême de Maurice sont à la retraite. La compétence technique des

431 Autrement dit, les Lords judiciaires sont les pairs qui ont occupé ou qui occupent une haute fonction dans la magistrature et détiennent leur dignité à titre viager.

432 Les Lords-Juges d?Appel sont membres de la Cour d?Appel, juridiction de deuxième degré.

433 Actuellement, en sus de la convention, l?actuel Lord-Chancelier, Lord Mackay of Clashfern, est d?origine écossaise.

434 Un peu comme à la Cour Suprême des Etats-Unis d?Amérique, la représentation géographique des juges y est très respectée. V. WALKER T. et EPSTEIN Lee: «The Supreme Court of the United States», New York, St. Martin?s Press, 1993, 207 p., v. p. 37-38.

435 BLOOM-COOPER Louis et DREWRY Gavin: «Final Appeal: a study of the House of Lords in its judicial capacity», Oxford, Clarendon Press, 1972, 584 p., v. p. 153-54.

436 Les Lords judiciaires n?ont pas d?assistant de recherche et ont peu d?aide de secrétariat. JOLOWICZ J. A: «Les décisions de la Chambre des Lords», RIDC, 1979, pp. 521 à 537.

437 Dans les affaires mauriciennes, par exemple, ont siégé, Sir Robert Megary et Sir Micheal Hardie Boys.

438 «In spite of the express provisions allowing representation of Dominion Judges on the various boards of the Privy Council... cases before the Privy Council have been heard almost exclusively by English and Scottish law Lords», MC WHINNEY Edward: «Judicial review in the English speaking world», University of Toronto Press, 1965, 244 p., v. p. 50.

hauts magistrats mauriciens, jugée peut-être non suffisante, explique sans doute leur absence au prétoire du Comité Judiciaire.

La composition du Comité Judiciaire demeure très britannique. Les juges du Commonwealth sont rarement désignés à siéger. Le facteur géographique ne permet pas qu?ils soient régulièrement sollicités. En somme, les membres réellement actifs du Comité Judiciaire sont globalement de quinze à vingt, c'est- à-dire les onze Lords judiciaires en fonction et, éventuellement, les autres juges des tribunaux britanniques et du Commonwealth. Ce nombre de juges est légèrement dérogatoire à la tendance des juridictions constitutionnelles à ne comporter qu?un nombre restreint de juges mais s?explique par le caractère même du Comité Judiciaire.

b. Le critère de compétence

Le Comité Judiciaire appartient à la catégorie des cours de Common Law quant au mode de recrutement de ses membres. Les cours de Common Law sont composés d?anciens grands praticiens du droit, tandis que les cours de droit commun du modèle romano-germanique sont composés de magistrats de carrière. Le système judiciaire britannique ne prévoit aucun système de déroulement de carrière pour les titulaires d?une fonction au sein de la magistrature439. Pour être nommé juge de première instance à la Haute Cour de Justice de Londres, il faut être un avocat disposant d?au moins de dix années de pratique au barreau de l?Angleterre et du Pays de Galles440. Les nominations sont effectuées par le Souverain sur proposition du Lord-Chancelier441. Le Lord-Chancelier apprécie la performance des avocats selon les avis qu?il reçoit des juges sur leurs activités et réputations. Le ministre de la justice anglais assure une véritable notation des avocats contenue dans un dossier désigné par sa couleur, le jaune (the yellow book). L?avocat ne fait pas acte de candidature à la fonction de juge. Il est invité par le gouvernement à accepter sa nomination. Ce mode de sélection des juges est hautement élitiste et s?apparente à la cooptation. Ce sont les juges qui nomment les juges, leurs successeurs et en général ils choisissent ceux qui leur ressemblent. Ils donneront un avis négatif sur l?avocat qui paraît déroger aux

439 «... the British judiciary is not a career service. No young law student can actually set out to become a judge, since there is no special school nor any competitive or other examination for entry to the judiciary», KINDER-GEST Patricia, cité note 58, v. p. 400.

440 «The system of recruitment which has prevailed up to the present day has always assumed that a good barrister will automatically make a good judge and therefore that he had no need of any particular in-depth training to prepare him for his new position», ibid., p. 401.

441 Dans la pratique, le Lord-Chancelier demeure en fonction plus longtemps que les autres ministres et peut effectuer ou proposer de nombreuses nominations. A titre indicatif, Lord Hailsham of St. Marylebone fut Lord-Chancelier de 1979 à 1987. Lord Makay of Clashfern est en fonction depuis 1987.

moeurs de la profession442. Le choix du Lord-Chancelier porte sur les quelques sept cent cinquante avocats en exercice ayant obtenu le titre honorifique de Conseiller de la Reine (Queen's Counsel), c'est-à-dire, le titre d?avocat émérite443. En moyenne les éminents avocats sont nommés à la Haute Cour de Justice444 à l?âge de cinquante ans445. Certains, après une expérience de huit à dix années seront promus à la Cour d?Appel qui comprend vingt-sept Lords-Juges. Ceux-ci sont nommés par le Souverain sur recommandation du Premier ministre446. Une petite minorité d?entre eux seront nommés à la Chambre des Lords et deviendront, en tant que Lords judiciaires447, membres actifs du Comité Judiciaire. Les magistrats britanniques ne sont élevés à la pairie avant d?avoir atteint en moyenne soixante-deux ans, c?est-à-dire, un niveau de maturité élevé. Ce modèle de recrutement des juges est qualifié de «professionnel» par rapport à celui dit «bureaucratique» du système continental, dans lequel les juges sont choisis par concours ouvert aux jeunes étudiants après leurs études universitaires. Le recrutement au Comité Judiciaire est donc centré sur des juristes de profession comme prôné par Hans Kelsen à propos des juridictions constitutionnelles448 (voir tableau 6 en annexe). La Grande-Bretagne recherche dans ses hauts magistrats une grande expérience des problèmes pratiques plutôt que de la compétence théorique449.

On peut, par contre, s?interroger sur la dépendance du système britannique de recrutement sur le bon vouloir de l?exécutif, du Lord-Chancelier en particulier, qui conseille le souverain à cet effet. Mais les moeurs et les usages propres à l?Angleterre font que le juge, une fois investi dans ses fonctions, oublie l?autorité qui l?a nommé pour ne penser qu?à sa charge

442 «A man or woman whose social or personal habits are unconventional or uncertain is not likely to be risk», GRIFFITH J. A. G.: «The politics of the judiciary», Londres, Fontana Press, 1991, 4e édition, 352 p., v. p. 29.

443 La Loi de 1990 sur les cours et le service judiciaire (Court and legal services Act 1990) prévoit que les avoués (Solicitors) de grande expérience pourraient être recrutés comme juges.

444 La Haute Cour de Justice, tribunal de première instance, comprend quelques quatre-vingt- cinq juges et est unique en Angleterre.

445 «La nomination à une fonction judiciaire dans une cour supérieure est toujours considérée comme le signe d?une éclatante réussite et le couronnement d?une carrière poursuivie avec succès au barreau», DAVID René: «Le droit anglais», PUF, Que sais-je ?, 1975, 126 p., v. p. 24.

446 A ce stade, les juges seront membres du Conseil Privé, mais y sont peu actifs.

447 Les Lords bénéficient d?une image de prestige et sont largement décorés. Leur statut leur permet d?incarner le respect qu?il faut pour la justice.

448 KELSEN Hans: «Le contrôle de la constitutionnalité des lois: une étude comparative des constitutions autrichienne et américaine», RFDC, 1990, pp. 17 à 30 et du même auteur: «La garantie constitutionnelle de la Constitution», RDP, 1928, pp. 197 à 257. Il soutient que: «Il est de plus grande importance d?accorder à la composition de la juridiction constitutionnelle une place adéquate aux juristes de profession... Le tribunal a en effet le plus grand intérêt à renforcer lui-même son autorité en appelant à lui des spécialistes éminents», ibid., pp. 227.

449 Les théoriciens du droit (academic lawyers) ne sont jamais affectés à la haute magistrature. V. SHETREET Shimon: «Judges on trial, a study of the appointment and accountability of the English judiciary», Oxford, North-Holland Publishing Company, 432 p., v. p. 58 et s.

éminente450. Il faut néanmoins se méfier de croire qu?avec ce système la Grande- Bretagne ne permet l?infiltration d?éléments politiques dans le judiciaire. Le Lord-Chancelier, juriste de formation, est un homme politique451. Aussi, certains Lords judiciaires ont été nommés en considération de leurs engagements politiques antérieurs452 ou de leur affinité idéologique avec le parti au pouvoir.

B. La composition des formations de jugement

La composition des formations de jugement (Boards) du Comité Judiciaire présente une particularité qu?il convient de mettre en relief. Il appartient au Lord-Chancelier de désigner pour chaque affaire les membres du Conseil qui composeront le comité ad hoc qui la jugera453. Dans la pratique, il semble que le Lord-Chancelier veille à une certaine régularité et stabilité dans le choix des juges (a). Nous verrons ensuite si ce principe est respecté à l?égard de l?île Maurice (b).

a. La stabilité dans le choix des juges

Les théoriciens du droit du Commonwealth n?avaient pas manqué d?être très critiques à l?égard de tout changement fréquent de personnel composant le Comité Judiciaire en séance454 et de l?appel aux juges qui ne possédaient pas une connaissance approfondie du système juridique concerné455. Le changement de personnel avait provoqué une instabilité de la jurisprudence vérifiée dans l?interprétation de la Constitution canadienne de 1867456. Selon la composition du tribunal londonien, la Constitution canadienne faisait l?objet soit d?une interprétation décentralisante, favorisant les droits et pouvoirs des provinces, soit d?une interprétation centralisante protégeant le pouvoir central du Canada.

450 PERROT Roger: «Institutions judiciaires», Monchrestien, 1995, 7e édition, 599 p., v. p. 302.

451 Aucun texte de loi ne prescrit les modalités de recrutement du Lord-Chancelier. Mais la tradition veut qu?il soit issu des avocats ayant exercé les fonctions d?officier de justice de la couronne, avocats du ministère public, ou de la haute magistrature.

452 «Atkinson and Shaw were appointed by Balfour and Asquith because they were party men, and party men were needed to ensure that the appellate functions of the House were handled from the appropriate political view point», STEVENS Robert: «Law and politics, the House of Lords as a judicial body 1800-1976», The University of North California Press, 1978, 701 p., v. p. 246.

453 Le Lord-Chancelier exerce une fonction similaire à la juridiction de la Chambre des Lords.

454 «To imagine that we shall ever get consistent and reasonable judgments from such a casualty selected and untrained court (as the Judicial Committee) is merely silly», SCOTT F. R.: «The consequences of the Privy Council decisions», CBR, 1937, pp. 485 à 494, v. p. 494.

455 BURNS P.: «The Judicial Committee of the Privy Council: constitutional bulkmark or colonial remnant ?», OLR, 1984, vol. 15, n°4, pp. 503 à 522.

456 Un juriste canadien avait écrit que le Comité Judiciaire fut: «a court of fluctuating personnel characterised by the appearance and quick disappearance of many members, a fact which has not been conducive to familiarity with our Constitution or conditions, and which has also led to the dominance of a few personalities whose attendance was more regular and prolonged», MAC DONNALD Vincent: «The Privy Council and the Canadian Constitution», CBR, 1951, pp. 1021 à 1037, v. p. 1024. Un autre juriste parlait d?un «shifting body of judges» à propos du Comité Judiciaire. V. CAIRNS Alain: «The Judicial Committee and its critics», RCSP, 1971, pp. 301 à 345, v. p. 331.

Le tandem des Lords Waston et Haldane protégeait les provinces de toute immixtion du pouvoir fédéral dans leur champ de compétence alors que Lord Sankey adoptait une approche inverse457.

En dehors du cas canadien qui ne présente plus qu?un intérêt historique, il nous est possible d?affirmer que le Lord-Chancelier choisit des spécialistes de la matière en instance pour siéger dans le comité ad hoc (panel)458 et le même groupe de juges est appelé à composer le Comité Judiciaire en séance pour juger des affaires similaires. Le Lord-Chancelier assure une mission complexe. Il veille à l?unicité de la jurisprudence. En même temps, il est soucieux du développement de la jurisprudence. C?est ainsi qu?il peut parfois solliciter l?assistance des Lords judiciaires à la retraite ou des rares juges du

C o mm on w e alt h 459.

Il est utile de faire remarquer que ce mode de sélection des juges permet à une cour de Common Law tel que le Comité Judiciaire, qui a une compétence générale, de se doter d?une certaine spécialisation interne de facto et donc d?une division fluide du personnel de la cour460.

b. Le cas mauricien

La composition du Comité Judiciaire dans les affaires mauriciennes reflète la même tendance du maintien de la stabilité461. La spécialisation de certains Lords en droit public mauricien est marquante Lord Keith of Kinkel, d?origine écossaise, a siégé pendant quinze années, de 1977 à 1992 et une fois sur deux dans les formations de jugement statuant sur des affaires relevant du droit public mauricien (voir tableau 7 en annexe). De même, Lord Templeman siège depuis 1982 et apparaît également en moyenne une fois sur deux.

457 «The vagaries of judicial interpretation of the Canadian Constitution are indeed an excellent index to the uncertainty of tenure of the personnel of the Privy Council», MC WHINNEY Edward, cité note, v. p. 52.

458 Le Lord-Chancelier est conseillé dans cette tâche par son secrétaire permanent (permanent secretary), le clerc principal du ministère de la justice (principal clerk of the judicial office) et le clerc du Conseil Privé (judicial clerk of the Privy Council).

459 «Past pattern of practice as to the constitution of such boards of the Privy Council indicates a remarkable element of consistency and regularity in the actual choosing of the judges, the same judicial names tending to recur, year after year, for the same general categories of cases and being determined either by technical backgrounds or by expressed personal preference... or by original casual accident of choice», MC WHINNEY Edward: «Supreme Courts and judicial law making: constitutional tribunals and constitutional review», Martinus Nijroff Publishers, 1986, 305 p., v. p. 29.

460 Les Lords provenant de la division de la chancellerie (Chancery Division) de la Haute Cour ne siègent que dans les affaires commerciales et non dans des affaires pénales et administratives réservées à ceux venant de la division du Banc de la Reine.

461 A titre de comparaison, trente personnes ont été membres du Conseil Constitutionnel français de 1977 à 1994 alors que trente-deux membres du Conseil Privé ont participé aux affaires mauriciennes de droit public durant la même période.

La pratique veut que chaque comité ad hoc de jugement comprenne deux ou trois juges d?un noyau dur de quatre à cinq Lords. Par exemple, de 1982 à 1991, au moins deux des Lords Keith of Kinkel, Brandon of Oakbrook, Templeman, Bridge of Harwich et Roskill ont participé aux formations de jugement statuant sur des affaires de droit public mauricien. Le même phénomène réapparaît entre 1987 et 1988 sur les six affaires jugées durant cette période. Le noyau dur était composé des Lords Griffiths et Akner et de Sir John Stephenson. Aussi, sur les sept arrêts prononcés de 1992 à 1993 trois des quatre Lords judiciaires Jauncey, Goff of Chieveley, Lowry et Oliver y étaient présents.

Toutefois, la spécialisation et la régularité apparaissent moins nettement en matière de droit pénal bien que les mêmes principaux Lords judiciaires, à savoir Lords Templeman, Keith of Kinkel, Bridge of Harwich, Oliver, Jauncey of Tullichettle et Brandon forment les comités de jugement (voir tableau 8 en annexe). Mais la présence de quelques chevaliers du Conseil, dont des juges de la Nouvelle-Zélande, sont à noter dans les affaires pénales462. A ce titre Sir Maurice Casey y est particulièrement régulier.

On insistera, enfin, sur les avantages que représente le mode de composition des formations de jugement du Comité Judiciaire. Le système présente deux bienfaits. Il assure avec la longue durée d?exercice des Lords, l?autorité de l?institution et évite, par le renouvellement constant, les ruptures brutales au profit d?une évolution souple. Les nouveaux Lords qui entrent en fonction dans les affaires mauriciennes apprennent progressivement leur métier au contact des anciens tout en questionnant toute jurisprudence que ces derniers pouvaient considérer comme acquise ou clairement évidente. Dans la pratique, le système retenu par le Conseil Privé peut être rapproché du renouvellement triennal du Conseil Constitutionnel français.

Paragraphe 2. Analyse sociologique et empirique de la composition du Comité Judiciaire

Notre analyse du recrutement des juges du Comité Judiciaire ne serait intégrale si nous ne procédons à une étude sociologique et empirique de la composition de la Haute Instance londonienne (A).

462 Le fait d?adjoindre des juges néo-zélandais répond, semble-t-il, à un souci de prise en considération des difficultés rencontrées en général par les autorités publiques des pays du Commonwealth sur le plan procédural aux procès pénaux, notamment sur le problème des délais à respecter, vérifiées dans les arrêts publiés.

Par ailleurs, il nous apparaît opportun de comparer le Comité Judiciaire, du moins dans sa composition, à la fois avec une grande juridiction et une cour constitutionnelle (B).

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"L'ignorant affirme, le savant doute, le sage réfléchit"   Aristote