Paragraphe I : Les atteintes à
l'intégrité morale du patient.
La Déclaration Universelle des Droits de
l'Homme de 1948 consacre le droit au respect de la vie privée. Ce droit
est repris par le préambule de la loi constitutionnelle du 18 janvier
1996 révisant la Constitution du 02 juin 1972, modifiée et
complétée dans certaines de ses dispositions par la loi
No 2008/001 du 14 avril 2008. Le médecin, dans l'exercice de
son art, entre en possession des informations intimes concernant la vie du
patient. En vertu de la relation de confiance issue du contrat passé
entre le médecin et son patient, ce dernier est amené à se
confier auprès du médecin dans le souci premier que ces
informations ne seront pas divulguées, mais, surtout, qu'elles seront
indispensables pour lui procurer la guérison. La divulgation des
informations par le médecin ou toute pratique dégradante à
l'encontre du malade peut voir sa responsabilité
engagée.
C'est le cas lorsque le praticien viole le secret
médical (A) ou lorsqu'il commet des actes qui ne vont pas dans
l'intérêt médical et qui sont plutôt guidés
par la perversité du praticien. Il en est ainsi pour les atteintes
à la pudeur, les abus sexuels en l'occurrence (B).
A- La violation du secret médical.
« Je jure par Apollon,
médecin par Esculape, par Hygie et Panacée, par tous les dieux et
par toutes les déesses, et je les prends à témoin que
(...)Tout ce que je verrai ou entendrai autour de moi, dans l'exercice de mon
art ou hors de mon ministère, et qui ne devra pas être
divulgué, je le tairai et le considérerai comme un
secret»131. Et c'est en ces termes que le corps
médical a emprunté le fondement de sa doctrine. Ce serment est
une obligation morale à laquelle s'engage le médecin.
Le secret médical, variété du secret
professionnel en général, constitue tout autant un droit qu'une
obligation.
131 Cf. Serment d'HIPPOCRATE.
Entendu comme droit, << il s'agit
d'une prérogative essentielle de la personne humaine qui
nécessite à cet effet une protection juridique se fondant sur la
nécessaire sauvegarde de l'intimité de la vie
privée >>132.
Pris comme une obligation, il s'agit pour le
médecin d'une déontologie, d'une éthique médicale
dont la finalité est de préserver l'intégrité
physique et psychologique du malade autant que de conforter le pacte de
confiance établi entre le praticien de la santé et son patient.
La considération de cette double exigence d'une part, la
référence au texte de base en la matière, notamment
l'article 310 du Code pénal a donné lieu à de vives
controverses en doctrine aujourd'hui encore plus irréductibles sur la
nature juridique et le caractère du devoir au silence imposé au
praticien de la santé. Certains auteurs en France133 à
partir des premières années du XIXe siècle
estimaient que ce texte de base avait pour but de sanctionner la violation,
analogue à l'abus de confiance d'un contrat formé entre le
médecin et son client. La principale conséquence était que
le délit disparaissait toutes les fois que la révélation
avait eu lieu avec le consentement de l'auteur de la confidence ; ce qui
revenait en outre à conférer une portée relative à
cette règle. Une telle manière de voir semble confortée
aujourd'hui dans la pratique, eu égard aux nécessités de
la vie moderne avec en particulier le développement des assurances sur
la vie. La lettre même de l'article 310 du code pénal semble en
faire écho car << est puni (...) celui qui, sans
l'autorisation du propriétaire de la confidence...
>>.
Pour d'autres auteurs au contraire, l'intervention de
la loi pénale répond principalement à
l'intérêt social ; le devoir de silence consacré par les
textes a été imposé en faveur de tous les particuliers qui
pourraient un jour avoir affaire, volontairement ou non, aux membres d'une
profession appelée à connaître des secrets d'autrui. La
confiance qu'ils manifesteraient donc en leur confiant des secrets sans
arrière pensée mériterait ainsi une protection juridique
susceptible d'accroître la crédibilité de certaines
professions dont le fonctionnement est nécessaire au bien commun de la
société. Comme corollaire à une telle assertion, l'on
attribuera une portée générale et absolue à cette
règle; un caractère d'ordre public.
De cette controverse doctrinale, il ressort que le
secret confié au médecin est le symbole de la confiance qui
existe entre le patient et le praticien. Sa violation perturbe le
concerné et est susceptible de troubler l'ordre social. En vertu des
intérêts qu'il pourrait mettre en jeu, la violation du secret
médical est réprimée par l'article 310 du Code
pénal.
132 NONGA (J.-M.), << Le secret médical
>>, mémoire de maîtrise de Droit privé, année
académique 1990-1991 Université de Yaoundé, Faculté
de Droit et Science Economique. P.1-5.
133 Ibid, p.15.
L'examen de la violation du secret médical
permet de mieux appréhender les atteintes à
l'intégrité morale du patient. Toutefois, cette
compréhension serait incomplète si nous ne faisons état
des abus sexuels.
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