A- Les causes d'exonération propres à la
liberté d'action du médecin.
L'intérêt du patient peut amener le
praticien à prendre des mesures visant à lui sauver la vie. C'est
le cas par exemple lorsque le médecin, dans le souci de préserver
la santé et de sauver la vie de la mère peut être
amené à procéder à un avortement dit <<
thérapeutique >> s'il est établi
que le fait de mener à terme la grossesse pourrait s'avérer
dangereux pour la mère (1). Dans la même optique, la
stérilisation de la mère vue comme mesure de contraception si la
conception peut présenter un danger pour sa vie (2).
1- Les avortements dits «
thérapeutiques ».
La Constitution de la République du Cameroun
<< protège et encourage la famille, base naturelle de
la société humaine >>43. C'est la
raison pour laquelle le législateur a mis en oeuvre des dispositions
pour protéger l'enfant et la famille44. Parce qu'il est
garant de la protection des droits et libertés conformément
à l'article 26 de la Constitution, le législateur camerounais
réprime l'avortement45. Le médecin qui s'expose
à de telles pratiques comme l'énonce le Code pénal, verra
sa peine doublée. En outre, étant donné que la pratique de
l'avortement va à l'encontre de l'éthique professionnelle, le
Code de déontologie en son article 29 énonce que : <<
Toutes pratiques ou manoeuvres d'avortement sont interdites
>>.
Toutefois, parce que le respect de la vie constitue en
toute circonstance le devoir premier du médecin, sauver la mère
d'un péril grave pour sa santé justifie le recours à
l'avortement. De ce fait, << en cas de grossesse
résultant d'un viol, l'avortement médical ne constitue pas une
infraction s'il est effectué après attestation du
ministère public sur la matérialité des faits
>>46. Dans le même ordre d'idée, le Protocole
à la Charte Africaine des Droits de l'Homme et des Peuples, relatif aux
droits de la femme en Afrique adopté à Maputo (Mozambique) le 11
Juillet 2003 reconnaît à la femme en son article 14 le droit
à la santé et au contrôle des fonctions reproductrices.
C'est ainsi que l'alinéa 2c dudit article dispose que : <<
les Etats prennent toutes les mesures appropriées
pour...protéger les droits reproductifs de la femme,
particulièrement en autorisant l'avortement médicalisé, en
cas d'agression
43 Voir préambule de
la loi constitutionnelle du 18 Janvier 1996.
44 Chapitre 5 du titre 3,
C.P.
45 Art. 337 du Code
pénal : <<1- Est puni (...) la femme qui se procure l'avortement
à elle-même ou qui y consent.
2- Est puni (...) celui qui, même avec son
consentement procure l'avortement à une femme.
3- Les peines sont doublées :
a- A l' encontre de toute personne qui se livre
habituellement à l'avortement
b- A l' encontre d'une personne qui exerce une
profession médicale ou en relation avec cette profession.
4- La fermeture du local professionnel et l'interdiction
d'exercer la profession peuvent en outre être ordonnés dans les
conditions prévues aux articles 34 et 36 du présent code...
>>
46 Al.2, art.337,
C.P.
sexuelle, de viol, d'inceste et lorsque la grossesse met en
danger la santé mentale et physique de la mère ou la vie de la
mère ou du foetus ».
Le premier type d'avortement constitue ce que le Code de
déontologie qualifie
d' << avortement
thérapeutique». On y fait recourt si cette
intervention est le seul moyen susceptible de sauver la vie de la mère.
Les avortements thérapeutiques sont strictement
règlementés et obéissent à une procédure
particulière47dont l'inobservation peut engager la
responsabilité du médecin.
Si le recours à l'avortement peut être
envisagé dans le but de sauver la mère, les stérilisations
peuvent également être entreprises dans l'intérêt du
patient.
2- Les stérilisations «
thérapeutiques ».
La protection de la vie constitue en tout point une
priorité pour le médecin. Si la nécessité
d'opérer un choix entre sauver la vie de la mère et celui de
l'enfant est imposé au médecin, le praticien devra donner
priorité à celle de la mère. Il est des circonstances oil,
face à l'inefficacité des mesures contraceptives, et surtout aux
dangers que pourrait présenter une éventuelle grossesse pour la
mère, le médecin peut être sollicité pour
opérer la stérilisation de la patiente (les ligatures des trompes
sont les opérations les plus sollicitées dans ce cadre).
Opération délicate et complexe, elle doit s'effectuer avec le
consentement de la patiente. Si le but thérapeutique recherché
par le médecin est atteint, sa responsabilité ne peut être
retenue. Il serait loisible de relever que le Protocole de Maputo sus
cité reconnaît aux femmes un certain nombre de droits parmi
lesquels << le droit d'exercer un contrôle sur leur
fécondité ; le droit de décider de leur maternité,
du nombre d'enfants et de l'espacement des naissances ; le libre choix des
méthodes de contraception » 48.
Les causes d'exonération propres à la
liberté d'action du médecin ainsi présentées, il
s'avère nécessaire d'examiner les causes dues à des
agissements qui échappent à la volonté du
praticien.
47 Il s'agit des al. 2, 3, et
4 de l'art. 29 du Code de déontologie des médecins du
Cameroun.
48 Article 14 al. 1a, b, c,
Protocole à la Charte Africaine des Droits de l'Homme et des Peuples,
relatif aux droits de la femme en Afrique adopté à Maputo
(Mozambique) le 11 Juillet 2003.
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