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Contribution à  la protection juridique des enfants infectés ou affectés par le VIH- sida en droit burundais

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par Jean Claude NKEZIMANA
Université du Burundi - Licence 2005
  

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§3. Des mesures appuyant le CPF dans la protection des enfants infectés ou affectes par le VIH/SIDA.

La réforme du CPF que nous avons proposée serait sans grand effet en l'absence d'un système judiciaire qui tient compte de l'impact de la pandémie du SIDA sur la vie et les droits des enfants. De plus la nécessité de circonscrire et de s'occuper de ce phénomène de plus en plus préoccupant de l'enfance de la rue s'avère une urgence.

Pour cela, une série de mesures s'impose.

I. Réforme du système judiciaire.

La protection juridique des enfants infectés ou affectés par le VIH/SIDA comprend non seulement l'adoption des lois et règlements, mais également la capacité de les invoquer et de les faire appliquer par les tribunaux.

Cependant, notre système judiciaire actuel comporte des procédures complexes et inadaptées aux plaignants mineurs, et longues pour les personnes diminuées par la maladie.

C'est pourquoi, il s'avère nécessaire de tenir compte des problèmes juridiques liés au VIH/SIDA et de rendre la justice accessible pour les personnes vivant avec le VIH/SIDA et leurs familles en butte avec la violation de leurs droits. Pour cela il faut organiser des services d'assistance juridique pour eux.

1. Aménager des procédures adaptées aux personnes touchées par le SIDA

Il faut, comme le recommande les Directives internationales sur le VIH/SIDA et les droits de l'homme50(*), doter le système judiciaire des procédures juridiques et/ou administratives rapides et simples pour un plaignant malade notamment lorsqu'il est en phase terminale. De plus, il est nécessaire de prévoir la possibilité pour les organisations d'intérêt public d'agir en son nom.

En effet beaucoup de personnes sans scrupules profitent de ce qu'une personne n'est pas en bonne santé, plus particulièrement lorsqu'elles savent qu'elle a le VIH, pour s'approprier ses biens et comptent pour cela sur un long procès pour arriver à leur fin.

Ainsi, la possibilité des procédures rapides et simples prévues pour les plaignants malades ainsi que la possibilité pour les organisations d'intérêt public d'agir au nom du plaignant malade ou des orphelins permettraient d'éviter que les enfants soient spoliés de leurs biens.

Cependant, beaucoup de personnes vivant avec le VIH/SIDA et leurs familles ont besoin d'une assistance juridique.

2. Assistance juridique aux personnes vivant avec le VIH/SIDA et aux orphelins.

Les personnes infectées ou affectées par le VIH/SIDA, y compris les enfants, devraient avoir accès à une aide judiciaire gratuite ou au moindre coût. Cette proposition va dans le sens des recommandations formulées par les Directives internationales sur le VIH/SIDA et les droits de l'homme précitées qui demandent aux Etats de « créer et soutenir des services d'assistance juridique qui informeront les personnes touchées par le VIH/SIDA de leurs droits, fourniront gratuitement des conseils juridiques en vue de l'exercice de ces droits,... ». (Directive 7)51(*)

En effet, comme déjà souligné le VIH/SIDA entraîne aussi dans son sillage des phénomènes d'exclusion sociale et de nombreuses violations de droits des personnes qu'il touche en plus des problèmes de santé et de grande pauvreté. Cela fait que les personnes touchées par cette pandémie et leurs proches ont le plus besoin de recourir à la justice pour rentrer dans leurs droits. Or les services judiciaires sont souvent inaccessibles pour ces personnes vulnérables compte tenu du fait que les frais judiciaires sont élevés, les procédures judiciaires longues et complexes, alors que les questions juridiques liées au VIH/SIDA le sont autant sinon plus.

D'où la nécessité pour l'Etat et les autres intervenants en matière de prise en charge des personnes touchées par le VIH/SIDA de créer et de soutenir les services d'assistance juridique pour permettre aux orphelins et aux autres personnes touchées par le VIH/SIDA d'exercer leurs droits de l'homme et les droits qui leurs sont conférés par la loi en faisant appel à ces services.52(*)

Ces services auront entre autres tâches d'informer les personnes vivant avec le VIH/SIDA sur leurs droits et de les aider à préparer l'avenir de leurs enfants. A cet égard un intérêt particulier doit être mis sur la nécessité pour les parents d'enregistrer leurs biens afin de permettre aux enfants de connaître la nature, la quantité et la localisation des biens que les parents leur laissent. Cette aide doit également viser la rédaction par les parents des testaments et leur authentification par un notaire. Dans le même ordre d'idées, les parents doivent être encouragés à choisir un tuteur pour leurs enfants et qui prendra soin d'eux à leur mort.

Concernant leur mise en place, les services d'assistance juridique pour les populations vulnérables seront créés sur toute l'étendue du territoire. Pour y parvenir, l'Etat peut entre autres mesures, accorder un appui et des incitations d'ordre fiscal par exemple aux services juridiques du secteur privé comme celui des avocats ou des notaires pour leur permettre de fournir des prestations gratuites aux personnes touchées par le VIH/SIDA, y compris les enfants, dans les domaines comme la propriété, le droit à la santé, le droit à l'éducation ou le droit au travail, etc.

Parallèlement, dans le milieu urbain, il faudra encourager les organisations privées intervenant dans le domaine du VIH/SIDA d'inclure dans leur sein des services d'assistance juridique aux personnes touchées par le VIH/SIDA et leur octroyer de l'aide en ce sens.

Dans les régions rurales, l'approche serait d'encourager la création des réseaux communautaires de collaboration avec les services publics d'assistance juridique aux personnes vulnérables ou avec les associations des droits de l'homme.

II. Des mesures s'attaquant aux facteurs qui poussent l'enfant dans

la rue

Il convient de noter que le phénomène de l'enfance dans la rue est en partie le produit de l'impact socio-économique du VIH/SIDA sur les familles. En outre, les enfants de la rue sont susceptibles de contracter le SIDA plus que les autres enfants.

L'Etat avait prévu et organisé le système d'orphelinats pour résoudre le problème de l'enfant privé de son milieu familial. Mais les orphelinats n'ont pas la capacité d'absorber les orphelins dont le nombre ne cesse de croître à cause notamment du SIDA et de la guerre.

La prise en charge de l'orphelin ou autre enfant en difficulté par sa famille ou sa communauté peut contribuer à freiner ce phénomène de l'enfant abandonné à lui-même. C'est ce que recommande le Principe 5 de la Déclaration de Dakar qui énonce que « Toute personne directement affectée par l'épidémie doit rester partie intégrante de la communauté avec le même droit au travail, au logement, à l'éducation, aux services sociaux, ...avec le droit au conseil, aux soins et au traitement, à la justice et à l'équité. »53(*)

Mais pour rendre efficace ce mode de prise en charge, il faut prendre des mesures visant à alléger les conséquences économiques du VIH/SIDA sur les familles et les communautés mais aussi à éradiquer cette situation d'exclusion et de mauvais traitements dont est souvent victime l'orphelin dans sa famille et sa communauté.

1. Aider les familles et les communautés à prendre en charge leurs orphelins.

Aider les familles à prendre en charge et à encadrer leurs orphelins est le plus sûr moyen de circonscrire ce problème de l'enfant dans la rue.

Pour ce faire, il faut mettre en place une politique visant l'intégration sociale et l'encadrement des orphelins. Cette politique doit comporter des programmes qui aident les familles qui prennent en charge les orphelins et les autres enfants vulnérables afin d'améliorer leur capacité à prendre en charge, soutenir et protéger ces enfants et de les conduire à l'autofinancement par des activités génératrices de revenus.

Cette proposition traduit dans la réalité la disposition de l'article 38 de la Constitution qui engage l'Etat et les collectivités publiques à aider les familles dans leur tâche de protéger leurs enfants et de l'article 20 de la CDE qui complète cette disposition constitutionnelle en engageant les Etats qui l'ont ratifiée, dont le Burundi, à assurer à « tout enfant qui est temporairement ou définitivement privé de son milieu familial (...) une protection et une aide spéciales de l'Etat ».

Cependant l'aide doit être dirigée vers tous les enfants de la famille qui a accueilli les orphelins et non ces derniers seuls afin d'éviter des statuts différents aux enfants d'une même famille. En effet, il n'est pas utile de séparer les orphelins des autres enfants vulnérables (les enfants des familles qui ont accueilli des orphelins le sont souvent) car, cela risque de renforcer la discrimination et le rejet à l'égard des orphelins. D'un autre côté, cette façon de procéder peut avoir pour effet de stimuler la prise en charge des orphelins et des autres enfants vulnérables par les familles.

Ces programmes doivent également appuyer et soutenir les initiatives locales en matière d'assistance aux orphelins, notamment en suscitant la création des groupements et associations locaux qui pourraient agir comme relais à l'exécution de programmes d'assistance aux orphelins.54(*)Du même coup, ce sera une occasion de redynamiser les mécanismes traditionnels de prise en charge et de protection des populations vulnérables comme les veuves et les orphelins.

Enfin, à long terme, ces programmes doivent appuyer toutes les familles qui sont vulnérables et pas seulement les familles touchées par le VIH/SIDA, ceci pour assurer l'équité et lutter efficacement contre la discrimination des familles touchées par le VIH/SIDA.

2. Combattre la situation d'exclusion et de mauvais traitements

Combattre, uniquement au moyen de la loi, la situation d'exclusion et de mauvais traitements qui se pratiquent dans les familles contre les orphelins est une chose qui est à la limite du possible. Il faut utiliser d'autres approches comme l'éducation du public et la mobilisation de la communauté contre ces pratiques.

Ainsi, nous suggérons aux pouvoirs publics et aux autres intervenants de lancer de vastes campagnes de sensibilisation du public sur la nécessité de prendre en charge les orphelins du SIDA et les autres enfants en difficulté.

Pour ce qui est des mauvais traitements des enfants orphelins ou autres enfants en situation difficile, nous osons espérer que les mesures que nous avons suggérées d'impliquer davantage la communauté dans la défense de l'orphelin auront pour effet de responsabiliser davantage les personnes ayant en charge un orphelin.

Néanmoins, notre proposition va dans le sens d'appliquer et de renforcer, les règles du CP qui sanctionnent les mauvais traitements infligés à un enfant afin de punir toute personne qui est chargé de le protéger mais qui se rend coupable maltraitance à son égard. A notre sens, le fait d'être orphelin devrait constituer une circonstance aggravante dans le chef de la personne qui a recueilli l'orphelin mais le maltraite car souvent, ce fait ne laisse à l'orphelin désemparé d'autres recours que la rue.

3. Nécessité d'une législation sur les successions

A notre avis, le fait que la succession ne soit pas encore organisée par le droit écrit porte un grave préjudice aux enfants touchés par le SIDA, surtout les enfants issus des mères célibataires qui vivent dans les centres urbains loin de leurs familles d'origine.

En effet, comme la coutume burundaise refuse à la fille le droit d'hériter, les enfants d'une femme qui n'a pas été mariée héritent difficilement de leurs grands parents maternels à la mort de leur mère. De plus, subissant déjà une situation de déconsidération sociale liée à leur état d'enfants issus d'unions irrégulières, ils sont souvent rejetés par l'entourage et ils n'ont d'autre recours que la rue.

Ainsi, élaborer une législation sur la succession afin de l'enlever à l'empire de la coutume s'avère une urgence.

Cette législation doit se pencher plus particulièrement sur les problèmes de l'héritage des filles et le droit à la propriété des femmes mariées. Ainsi, tout en ayant à l'esprit de sauvegarder l'équilibre social, la législation sur la succession doit traiter autant que faire se peut, les filles et les garçons sur un même pied d'égalité en matière d'héritage et garantir expressément à la femme mariée le droit à la propriété sur ses biens.

Parallèlement à l'élaboration d'une loi sur les successions, il faut organiser des campagnes de sensibilisation et d'éducation du public ayant pour objet d'encourager les parents et les familles à aller au delà de la coutume et de traiter les filles sur le même pied d'égalité que les autres enfants en matière d'héritage. Car, les traiter différemment comme c'est le cas aujourd'hui est une forme de discrimination que le Burundi s'est engagé à éradiquer en ratifiant la CDE.

En effet, cette dernière stipule dans son l'article 2, 1. que : « Les Etats Parties s'engagent à respecter les droits (...) et à les garantir à tout enfant relevant de leur juridiction, sans distinction aucune, indépendamment de toute considération de race, de couleur, de sexe, (...), de ses parents ou représentants légaux, (...), de leur naissance ou de toute autre situation. ». (C'est nous qui soulignons).

Cette disposition signifie que refuser l'héritage à un enfant parce qu'il est de sexe féminin, ou parce qu'il est naturel ou est né d'une femme non mariée ou parce qu'il est infecté par le VIH/SIDA est illégal et constitue aux yeux du droit international de l'homme des pratiques néfastes qui favorisent la discrimination et l'exploitation et qui doivent être activement combattues55(*).

III. La prise en charge des enfants de la rue ou qui errent sur les

collines de notre pays

Pour les enfants qui vivent déjà dans la rue, l'Etat doit constituer un tutorat public pour eux. Ce rôle sera joué par le Département de la Protection Sociale qui sera décentralisé sur tout le territoire et qui comprendra en son sein une cellule constituée à cet effet.

Le département de la protection sociale, relativement aux enfants de la rue aura pour mission de travailler en collaboration avec les autres intervenants dans ce domaine à trouver les origines familiales de ces enfants et les familles qui puissent les accueillir temporairement ou définitivement. Pour ceux dont on ne peut trouver ni origines familiales ni familles d'accueil, l'Etat devra diriger l'aide de la communauté internationale vers la construction des maisons pour eux.

Il faut également prévoir pour tous ces enfants des programmes comprenant des activités d'encadrement. A cet égard les programmes d'enseignement aux métiers ainsi que les activités génératrices de revenus semblent les mieux indiqués pour amener progressivement ces enfants ainsi réinsérés à se prendre en charge eux-mêmes.

En dehors du CPF, il existe d'autres dispositions qui peuvent nous être utiles dans la protection des droits des personnes en général et des enfants en particuliers eu égard aux droits les plus souvent violés dans le contexte de la pandémie du SIDA. Néanmoins, elles présentent elles aussi des lacunes et méritent d'être adaptées au contexte du VIH/SIDA.

* 50 HCDH, ONUSIDA, Directives Internationales VIH/SIDA et droits de l'homme, Directive 5, Génève, 1997, pp 17-18

* 51 HCDH, ONUSIDA, op. cit , p25

* 52 Ibidem

* 53 Déclaration de Dakar in Réseau Africain sur l'Ethique, le droit et le VIH/SIDA, op.cit., p.3

* 54 APRODEC, op.cit., p.78

* 55 ONUSIDA/UIP, Guide pratique à l'intention du législateur, la législation et les droits de l'homme, Génève 1999, p. 107

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