WOW !! MUCH LOVE ! SO WORLD PEACE !
Fond bitcoin pour l'amélioration du site: 1memzGeKS7CB3ECNkzSn2qHwxU6NZoJ8o
  Dogecoin (tips/pourboires): DCLoo9Dd4qECqpMLurdgGnaoqbftj16Nvp


Home | Publier un mémoire | Une page au hasard

 > 

Les petites constitutions en Afrique: essai de réflexion à  partir des exemples de la Côte d'Ivoire, de la RDC, de la Tunisie et du Togo.

( Télécharger le fichier original )
par Kakessiwa Kokou KOMLAN
Université de Lomé - Master 2 en Droit Public 2015
  

précédent sommaire suivant

Bitcoin is a swarm of cyber hornets serving the goddess of wisdom, feeding on the fire of truth, exponentially growing ever smarter, faster, and stronger behind a wall of encrypted energy

A. La création d'un droit constitutionnel circonstanciel

A n'en point douter, les petites constitutions créent un droit constitutionnel des situations de crise127.

En effet, dans les cas où la Constitution en vigueur est abrogée, la petite constitution devient la Loi fondamentale de la période de transition. Cependant dans les cas où la Constitution en vigueur est seulement contestée, comme ceux de la plupart des Etats africains, la logique juridique aurait consisté à régler les crises politiques dans le cadre de la normativité constitutionnelle. Mais, les Constitutions africaines, pour la plupart se sont révélées incapables. C'est ainsi que la défaillance des mécanismes constitutionnels africains de résolution des crises a déterminé la mobilisation de ressources complètement étrangères à la Constitution : il s'agit des accords politiques.

Selon une définition esquissée par Jean-Louis ATANGANA-AMOUGOU, les accords politiques peuvent s'entendre de « tout accord conclu entre les protagonistes d'une crise politique interne ayant pour but de la résorber, quelle que soit sa dénomination »128. Il faut ainsi préciser qu'ils ont pour vocation de régir le fonctionnement des institutions du moins jusqu'à la fin de la crise ou conflit politique. Ils visent donc à réadapter le fonctionnement des différents pouvoirs aux intérêts et aux forces en présence afin de stabiliser les institutions. Ce qui semble les consacrer comme de véritables droits pendant la période de crise. En effet par leur fonction et leur répétition, les accords politiques participent en Afrique à la naissance d'un processus de formation d'un droit constitutionnel en devenir dont le résultat final serait l'existence à côté du droit constitutionnel général, d'un droit constitutionnel spécial de circonstance. A titre illustratif, le professeur Jean DU BOIS DE GAUDUSSON fait observer à propos de la crise ivoirienne que l'Accord de Linas-Marcoussis « définit en réalité une nouvelle Constitution et que son objectif est précisément de réviser le dispositif institutionnel et de contenir des recommandations

127 Voir en ce sens HOUNAKE (K.), Les juridictions constitutionnelles dans les Démocraties émergentes de l'Afrique noire francophone : les cas du Bénin, du Gabon, du Niger, du Sénégal et du Togo, Thèse de Doctorat en Droit public, Université de Lomé-Université de Poitiers, 06 avril 2012, p. 481.

128 ATANGANA-AMOUGOU (J.-L.), « Les accords de paix dans l'ordre juridique interne en Afrique », Revue de la recherche juridique, Droit prospectif, 2008, p. 1723.

Mémoire Master II - Les petites constitutions en Afrique : essai de réflexion à partir des exemples de la Côte d'Ivoire, de la République Démocratique du Congo, de la Tunisie et du Togo.

nouvelles non conformes à celle toujours en vigueur »129. Il en est de même de l'Accord Politique Global signé en 2006, entre les protagonistes de la crise politique togolaise130.

La crise de la normativité en Afrique131 a donc fait naître un droit constitutionnel qu'il est permis de considérer comme un produit de l'ingénierie constitutionnelle en oeuvre dans les Etats africains en crise132.

Cependant si les accords politiques contribuent, en Afrique, à reformuler les Constitutions existantes pour les réadapter aux crises afin de préserver la légalité constitutionnelle dans les Etats concernés, ils assurent par la même occasion la sauvegarde de celles-ci.

B. La sauvegarde de la Constitution existante

Les accords politiques visent à sauver la Constitution en période de crise. Ils sont conçus pour pallier les insuffisances de la norme constitutionnelle qui ne peut ni tout prévoir, ni tout régler. Leur conclusion participe donc de la nécessité de régler les problèmes juridiques ou politiques nés des Constitutions. Ainsi viennent-ils en période de crise rendre l'atmosphère moins tendue, car ils conduisent à un certain apaisement qui dénote d'un consensus trouvé favorisant le retour à la vie normale de l'Etat et protégeant du coup l'ordre constitutionnel.

Les accords politiques constituent donc une sorte de rempart qui protège la Constitution et sur laquelle viennent s'écraser toutes les menaces trimbalées par les crises. Cette protection de la norme constitutionnelle par les arrangements politiques exprime finalement le rôle positif que peuvent jouer les accords politiques lorsqu'ils sont intégrés dans le dispositif constitutionnel de l'Etat. C'est le cas en Côte d'Ivoire où, après le basculement du pays dans une crise profonde dont les effets ne sont pas prêts d'être oubliés

129 DU BOIS DEGAUDUSSON (J.), «L'accord de Marcoussis, entre droit et politique », Afrique Contemporaine, n0 206, 2003, p 46.

130 Cet accord est signé entre le RPT, parti au pouvoir, d'une part et cinq partis de l'opposition

traditionnelle (le CAR, la CDPA, la CPP, le PDR et l'UFC) et deux organisations de la société civile (GF2D et le REFAMP/T).

131 AIVO (F. J.), « La crise de normativité de la Constitution en Afrique », op.cit., p. 141.

132 ANDZOKA-ATSIMOU (S.), L'ingénierie constitutionnelle, solution de sortie de crise en Afrique :

les exemples de l'Afrique du Sud, de la République démocratique du Congo, du Burundi et du Congo, Thèse de Doctorat en Droit public, Université Cheikh Anta Diop de Dakar, 2013, 712 p.

43

Mémoire Master II - Les petites constitutions en Afrique : essai de réflexion à partir des exemples de la Côte d'Ivoire, de la République Démocratique du Congo, de la Tunisie et du Togo.

suite au concept d' « ivoirité »133, le consensus fut retrouvé plus tard à travers l'accord de Linas-Marcoussis dont la substance essentielle est de nos jours intégrée dans le dispositif constitutionnel en vigueur.

Au demeurant, puisque le droit ne peut à lui seul régler tous les problèmes, il est souhaitable de recourir à une petite constitution notamment un accord politique qui permet de compléter et de sauvegarder la Constitution dans ces circonstances exceptionnelles que constituent les périodes de crise, afin que cette dernière reprenne force et vigueur après la crise.

En toute évidence, l'analyse de cette première partie aura permis de cerner théoriquement les petites constitutions à travers l'étude de leur nature et de leur fonction. Il convient cependant d'illustrer et de vérifier ces réflexions théoriques dans une approche plus concrète à travers leur typologie.

.

133 TOULOU (L.), « Election de la peur ou peur des élections : dilemme et contretemps de la sortie de crise en Côte d'Ivoire », inédit, p 5.

44

Mémoire Master II - Les petites constitutions en Afrique : essai de réflexion à partir des exemples de la Côte d'Ivoire, de la République Démocratique du Congo, de la Tunisie et du Togo.

précédent sommaire suivant






Bitcoin is a swarm of cyber hornets serving the goddess of wisdom, feeding on the fire of truth, exponentially growing ever smarter, faster, and stronger behind a wall of encrypted energy








"Ceux qui vivent sont ceux qui luttent"   Victor Hugo