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Les relations financières entre l'état et les collectivités territoriales


par Sandrine Cesbron
Université de Bordeaux  - M2 Droit des collectivités territoriales  2020
  

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A. Une communicabilité entre l'Etat et les collectivités territoriales à renforcer

En décembre 2008, la Fondation internationale de Finances publiques a publié un rapport au sein duquel elle a mis en évidence « une forme d'incommunicabilité entre l'État et les collectivités locales, qui ne s'accordent pas sur la même grille d'analyse des problématiques, n'aboutissent pas aux mêmes constats, et divergent sur les interprétations »108.

En ce sens, les finances publiques nationales et locales doivent former un tout indissociable, regroupant des acteurs aux mêmes finalités. Or, le problème évident est que bien souvent l'Etat, animé par la volonté d'atteindre certains objectifs, transfère des compétences aux collectivités territoriales, qui ne vont pas forcément avoir les mêmes objectifs que lui.

Comme le souligne Jean-Luc BOEUF, l'ambiguïté ne réside pas dans « la qualité des analyses »109, mais plutôt dans leur objet. En effet, en tant qu'adjectif, l'incommunicabilité s'entend de ce « qui ne peut être transmis par un mode d'expression déterminé ou par n'importe quel mode d'expression ; qui n'est pas accessible à la pleine compréhension d'autrui en raison de son caractère particulier et foncièrement individuel. »110

108 FONDAFIP, « Sept questions préalables à la conception d'un nouvelle gouvernance financière locale », décembre 2008

109 Jean-Luc BOEUF, « L'autonomie financière des collectivités locales existe-t-elle ? », Gestion & Finances Publiques (n°11), 2009, p. 838

110 Centre national de ressources textuelles et lexicales

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Dès lors, il est légitime de croire qu'en l'absence de renforcement de la communication entre l'Etat et les collectivités territoriales, celles-ci seront toujours soumises à un lien de dépendance, nécessitant une intervention de l'Etat régulateur.

Par ailleurs, la Fondation précitée reproche au système financier local de n'être « ni exclusivement, ni directement financier ». Il s'agirait, en somme, d'une organisation de pilotage des politiques publiques à la tête de laquelle se trouverait l'Etat. Ici, il faudrait toutefois favoriser une concertation des différents acteurs pour réguler les évolutions des ressources et des dépenses publiques notamment.

Par exemple, la compétence éducation relève, selon l'alinéa 13 du Préambule de la Constitution du 27 octobre 1946, du domaine d'action de l'Etat. Cependant, en raison de la charge financière induite, certaines communes assurent le fonctionnement courant des établissements scolaires. En 2008, la Cour des comptes avait recommandé à l'Etat de clarifier le périmètre de dépenses communales obligatoires au titre de l'Ecole, et de mettre en place des outils méthodologiques et comptables évaluant cette dépense. En effet, les communes ont en charge la rémunération supplémentaire des agents qui s'occupent des enfants durant le temps scolaire, temps déterminé par l'Etat. Pour faciliter ce partage de compétences, la carte scolaire se construit dans le cadre d'un dialogue entre l'Etat et les collectivités territoriales, depuis la circulaire du 8 septembre 2003111.

A l'instar de Jean-Luc BOEUF, il faut noter que « le débat est moins de savoir s'il faut plus ou moins d'État [...] mais d'appréhender la question du contenu de la sphère publique dans son ensemble. »112 Effectivement, les politiques publiques semblent plutôt devoir être appréhendées dans leur ensemble. D'ailleurs, n'est-ce pas pour une meilleure réalisation de leurs objectifs que l'Etat transfère ses compétences aux collectivités ?

En réalité, nombreux sont les domaines dans lesquels il ne dispose plus des moyens financiers et humains nécessaires. Cependant, cela ne l'empêche pas de persévérer dans son rôle de chef-de-file, qu'il devrait pourtant affaiblir, ou du moins limiter (B).

B. Un rôle d'Etat interventionniste à limiter

Selon le professeur KADA, « l'Etat définit une politique générale et en oriente ensuite les déclinaisons territoriales en ciblant les financements ou en procédant par la voie d'appel à projets. »113

Dès lors, il faut entendre que l'Etat décide des politiques publiques qui seront développées localement, notamment en usant de son rôle de décideur politique. Ensuite, lorsque le budget national est voté, et que des crédits sont alloués à certains domaines, cela influe également l'action locale. Ainsi, si la part du budget allouée à l'éducation est plus conséquente que la part relative à l'environnement, alors les collectivités territoriales n'auront d'autre choix que de se focaliser sur le développement de la première. En parallèle, plusieurs exemples viennent au soutien de cet argument.

111 Circulaire n° 2003-134 du 8 septembre 2003

112 Jean-Luc BOEUF, « L'autonomie financière des collectivités locales existe-t-elle ? », Gestion & Finances Publiques (n°11), 2009, p. 838

113 Nicolas KADA, Professeur agrégé de droit public, codirecteur du CRJ (université Grenoble-Alpes) et du GRALE (GIS université Paris-I, « Etat et collectivités territoriales : (petite) cuisine et (grandes) dépendances », AIDA 2019, p. 2423

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D'abord, en matière de santé et de protection sociale, l'Etat pilote les agences régionales de santé depuis la loi du 21 juillet 2009114, par le biais du Conseil national de pilotage, qui fournit aux premières les directives nécessaires à la mise en oeuvre de la politique nationale de santé sur leur territoire. D'ailleurs, durant la période de crise sanitaire liée au Covid-19, le Parlement a habilité le Gouvernement à prendre des ordonnances à destination des collectivités territoriales.

Ainsi, l'ordonnance relative aux mesures de continuité budgétaire, financière et fiscale des collectivités territoriales et des établissements publics locaux afin de faire face aux conséquences de l'épidémie de Covid-19, du 25 mars 2020115, pose plusieurs dérogations aux délais initialement imposés en matière budgétaire. De la même façon, les collectivités se sont vu octroyer des délais supplémentaires pour la fixation des taux de leurs taxes locales. En outre, le plafond des dépenses imprévues a été rehaussé à 15% des dépenses prévisionnelles de chaque section, au lieu de 7,5% avant la crise.

Cet exemple permet de comprendre comment les budgets locaux peuvent être façonnés par les décisions nationales, qui peuvent avoir un effet direct sur les dépenses de fonctionnement des collectivités territoriales, à l'instar de l'achat de masques en tissu. Cette dépense conséquente, résultant de la politique nationale, n'était évidemment pas prévue dans les budgets locaux.

Outre cet argument résultant d'une situation exceptionnelle, en matière d'habitat, les préfets retranscrivent les politiques nationales au niveau local, au sein des documents d'urbanisme correspondants, ce qui prouve bien que les collectivités territoriales ne sont pas celles qui décident de l'orientation à donner aux politiques. Là encore, c'est l'Etat qui, en tant que chef-de-file, impulse leurs actions.

Son ascendant se retrouve aussi à travers les contrats de plan Etat-région qui, au service d'une politique transversale, doivent permettre de relancer l'investissement local, en finançant des projets d'avenir comme la mobilité multimodale, l'enseignement supérieur, ou encore le numérique. Dès 1982, le Conseil d'Etat avait confirmé leur nature contractuelle en estimant qu'aucune « disposition législative [n'a] entendu conférer à la stipulation dont s'agit du contrat de plan passé entre l'Etat et la région Alsace une portée autre que celle d'une stipulation contractuelle »116.

Or, pour certains auteurs, ces contrats ne sont en fait que des actes unilatéraux aux objectifs politiques, puisque les compétences des collectivités territoriales doivent être limitativement énumérées, et qu'ils doivent se fonder sur des cadres précisément identifiés.

Ces quelques exemples permettent d'illustrer la place de l'Etat au sein des politiques locales, dont il est l'instigateur, mais aussi parfois l'acteur principal. Au-delà de son rôle prépondérant, il peut aussi limiter celui des collectivités territoriales, en leur octroyant plus ou moins de compétences, mais aussi et surtout, plus ou moins de moyens, notamment financiers.

114 Loi n° 2009-879 du 21 juillet 2009 portant réforme de l'hôpital et relative aux patients

115 Ordonnance n° 2020-330 du 25 mars 2020 relative aux mesures de continuité budgétaire, financière et fiscale des collectivités territoriales et des établissements publics locaux afin de faire face aux conséquences de l'épidémie de covid-19

116 Conseil d'Etat, Assemblée, 8 janvier 1988, Ministre chargé du Plan et de l'Aménagement du territoire, requête n° 74361, Considérant 5

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En réalité, l'Etat semble intervenir partout, et chaque fois que cela lui convient, sans considération des revendications des collectivités territoriales alors même qu'elles appellent à plus d'autonomie, et à une reconnaissance de leurs différences par l'Etat (II).

II. Une reconnaissance progressive des différences des collectivités

territoriales par l'Etat

Une double faculté de différenciation est proposée aux collectivités territoriales. La première consiste en une différenciation de compétences (A) ; la seconde, en une différenciation des normes qui leur sont applicables (B).

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"Soit réservé sans ostentation pour éviter de t'attirer l'incompréhension haineuse des ignorants"   Pythagore