WOW !! MUCH LOVE ! SO WORLD PEACE !
Fond bitcoin pour l'amélioration du site: 1memzGeKS7CB3ECNkzSn2qHwxU6NZoJ8o
  Dogecoin (tips/pourboires): DCLoo9Dd4qECqpMLurdgGnaoqbftj16Nvp


Home | Publier un mémoire | Une page au hasard

 > 

La spécialisation fiscale, éléments de refondation de l'action publique locale: reflexion sur les concepts d'efficacité et de gouvernance territoriale


par Bajer Joma Amada
Université Aix-Marseille 3 -   2005
  

précédent sommaire suivant

Bitcoin is a swarm of cyber hornets serving the goddess of wisdom, feeding on the fire of truth, exponentially growing ever smarter, faster, and stronger behind a wall of encrypted energy

Section 2. Visibilité et légitimité de l'action publique locale

Le renforcement de la décentralisation et le développement des compétences locales ont permis de poser la question de la légitimité de l'action publique. Il s'agit d'un « regard neuf » suscité par les transformations contemporaines de l'action publique. Autrement dit, les pratiques territorialisées en matière d'action publique ont bouleversé les mécanismes traditionnels de légitimité et de visibilité de l'action publique. Dans ce contexte de transformations qui influencent même le discours politique et la communication locale, il n'est pas aisé pour le citoyen de situer l'information politique dans une logique de participation et de décision.

Si la communication politique a pris une place importante dans la conduite des politiques publiques locales, il est essentiel pour l'émergence d'une véritable démocratie citoyenne qu'elle ne soit une source de « manipulation » de l'information locale. C'est la raison pour laquelle la recherche de la légitimité et de la visibilité de l'action publique locale doit être accompagnée du renforcement des modes de gouvernance.

§1. Pour une meilleure visibilité et une nouvelle légitimité de l'action publique locale

Le problème que pose la participation des citoyens à la vie politique locale est essentiellement celui de la visibilité et de la légitimité de l'action publique des collectivités locales. Les collectivités territoriales sont, à ce titre et le plus souvent, engagées dans des opérations de communication principalement destinées aux administrés. Ces opérations que l'on qualifie de maîtrise d'images lorsqu'elles sont orientées vers l'extérieur, sont des moyens, pour les décideurs locaux, de donner de la visibilité à leur offre de services publics.

C'est ainsi que « l'image est l'expression symbolique de la représentation que produit la collectivité. Cette image se construit à partir de l'ensemble des messages, des informations, de l'organisation de l'espace et des services. Elle se développe à l'interne auprès et avec les personnels et les habitants, se diffuse à l'externe auprès et avec les touristes, les entreprises et les institutions ».18(*)

Dans ce processus de structuration de l'image d'une collectivité locale, les citoyens jouent un triple rôle qui les place de facto dans une position majeure au sein du processus d'élaboration et de réalisation des politiques publiques locales. En effet, ils sont à la fois récepteurs de l'image, vecteurs de celle-ci à l'extérieur et acteur de son évolution dans le temps. Ce processus concerne l'élaboration de la visibilité. Par ailleurs, la communication locale, en même temps qu'elle structure la visibilité, favorise, par la participation des citoyens, le renforcement de la légitimité de l'action publique locale. C'est en ce sens que l'offre de services publics locaux ne peut être appréhendée seulement en termes de visibilité. Elle nécessité une légitimité dans la mesure où elle est sous tendue par le principe de proximité.

Bien sûr, il existe un écart entre l'idéal et le réel dans le rôle que doit jouer la structuration de la visibilité et de la légitimité. En effet, compte tenu des bouleversements introduits en termes de compétences obligatoires et optionnelles par les lois de décentralisation, la légitimité est une conséquence de la visibilité et un aspect de la proximité. En d'autres termes, dans le paysage des compétences, le citoyen local a besoin de lire clairement les actions locales pour mieux exprimer la légitimité. C'est-à-dire que le citoyen- observateur doit se transformer en citoyen- acteur de l'action publique locale. Or, le plus souvent, les élus locaux représentants ultimes de la légitimité démocratique élaborent des opérations de structuration de l'image qui peuvent, à certains égards, frôler la « manipulation ».

Le rapport BERT et CHAMPSAUR (2003) préconisait une simplification et une clarification de l'administration fiscale. Certes, il s'agit avant tout de l'administration d'Etat mais comme on l'a vu c'est la logique de fonctionnement de l'administration fiscale d'Etat qui guide l'organisation du système fiscal local. En effet, au-delà de la superposition des niveaux d'impôts et des structures administratives, il existe un véritable problème d'interlocuteur en matière fiscal.

En fait, cet interlocuteur existe, il s'agit de l'administration fiscal de l'Etat mais cette situation n'est pas sans engendrer une confusion des genres dans un contexte où l'on milite pour plus de gouvernance et de visibilité dans les compétences des institutions publiques et dans la mise en oeuvre des actions publiques.

La nécessité de reformer la fiscalité locale se justifie par l'absence de visibilité dans la lecture de l'action publique locale. Une absence de visibilité due à la multiplication des décideurs locaux. Si, dans une certaine mesure, cette multiplication des décideurs locaux peut présenter des avantages, en matière de fiscalité, il semblerait que les inconvénients sont plus importants. On soulignera qu'une telle situation engendre une certaine lourdeur administrative.

Compte tenu de ces éléments, il est urgent de clarifier la situation en optant soit pour la recentralisation fiscale soit pour la spécialisation. Si les deux solutions présentent le même avantage de clarifier et de simplifier le système, il est indéniable que, pour les raisons d'efficacité et de gouvernance que l'on évoquait précédemment, le choix de la spécialisation semble plus judicieux. Par ailleurs, la spécialisation fiscale marque un pas en avant tandis que la recentralisation est une forme de retour en arrière dans un contexte où tout le monde s'accorde à dire qu'il faut renforcer la décentralisation. La superposition actuelle des impôts locaux participe, au même titre que la multiplication des décideurs locaux, à cette confusion.

Une illustration des problèmes posés par l'imbrication de différents niveaux territoriaux dans l'exercice de missions plus ou moins identiques est donnée par la cohabitation entre les pays et les groupements de communes. La question principale concerne la logique propre à chaque niveau territorial. Autrement dit, la logique des pays est elle compatible avec celle des territoires intercommunaux ? On sait que les pays ont été crées pour répondre essentiellement à un impératif économique tandis que les « les intercommunalités » entrent dans une vision institutionnelle plus large. En ce sens, il ne saurait avoir de concurrence entre les deux niveaux territoriaux.

Cependant, lorsqu'on réfléchit sur les problématiques de développement local, les réponses ne sont plus évidentes. C'est en ce sens que certains observateurs pensent que  l' évolution des fonctions des autres niveaux d'organisation territoriale conditionne pour une bonne part la place que peut tenir effectivement les pays en répondant aux objectifs fixés par ses promoteurs.

La montée en puissance de certains pouvoirs publics peut rendre plus ou moins nécessaire ou superflu cet échelon de coordination entres collectivités locales. Lorsqu'on fait le bilan des dix années d'existence des pays comme niveau de coordination territoriale, l'affirmation des territoires intercommunaux comme territoire de projet n'est pas aisée dans la mesure où on s'accorde à dire que les pays ont rempli leurs missions en la matière.

En effet, comme espace caractérisé par une souplesse organisationnelle et n'étant pas soumis aux rigidités institutionnelles, les pays favorisent les initiatives locales et le partenariat dans une démarche de projet.

En termes de légitimité politique des institutions locales en liaison avec la question fiscale, on peut se demander si la problématique de l'élection au suffrage universel des assemblées communautaires locales se poserait avec autant d'acuité si les groupements communautaires n'étaient pas majoritairement soumis au régime de la taxe professionnelle unique. En d'autres termes, c'est la question fiscale qui dicte les problématiques politiques. En ce sens, l'impôt retrouve sa véritable essence.

La lisibilité fiscale est non seulement une condition de bonne gouvernance locale mais elle entraîne également une clarification et une simplification administrative. Aussi, on ne peut soulever la problématique de la reforme des finances locales sans poser la question de la reforme budgétaire dans la mesure où cette dernière est un aspect majeur de la prise en compte du critère d'efficacité dans la conduite des financements des projets locaux. En effet, comme nous le soulignions précédemment, le budget doit être un instrument de prévision.

A ce titre, il faut rappeler les réformes en matières de techniques et de procédures budgétaires locales mises en oeuvre ces dernières années (mise en place de la M 14 le 1er janvier 1997 permettant ainsi aux communes de s'inspirer des techniques de comptabilité privée, adoption de la M 52 pour les départements et de la M 72 pour les régions toujours dans le même esprit de simplification et de clarification).

§2. De l'autonomie financière à l'autonomie fiscale, les modalités de mise en oeuvre de la spécialisation fiscale.

Quelle est la distinction entre le concept d'autonomie financière et celui d'autonomie fiscale ? Cette question nous a semblé majeure en ce sens où une bonne compréhension de la signification et de la portée de chaque concept permet de situer le débat sur la définition des ressources financières des collectivités locales. Or, pour une mise en oeuvre efficace de la spécialisation fiscale territoriale, il faut déterminer exactement les capacités (en termes d'atouts et de handicaps) de chaque collectivité territoriale. La prise en compte récente de la notion de potentiel financier en complément de celle de potentiel fiscal prouve l'importance de cette question. Bien que ce changement de critère concerne d'abords la détermination des concours étatiques aux collectivités locales, il apparaît être valable pour la spécialisation de la fiscalité locale.

Depuis son introduction, le concept d'autonomie financière locale s'est toujours situé entre l'idée d'une indépendance financière et la réalité d'une tutelle étatique et d'un contrôle juridictionnel. Bien qu'on évoque souvent ce concept, celui-ci n'a pas de définition précise. Son contenu est variable. Ainsi, le principe d'autonomie financière se présente comme la déclinaison du principe de libre administration des collectivités locales dans les domaines budgétaire et fiscal.

Juridiquement, ce principe n'a été reconnu que par la loi organique du 29 juillet 2004 après avoir été introduit par la révision constitutionnelle du 28 mars 2003. Le nouvel article 72-2 de la Constitution stipule ainsi que les collectivités « bénéficient de ressources dont elles peuvent disposer librement... peuvent avoir tout ou partie du produit des impositions de toute nature. ». Par ailleurs, « les recettes fiscales et les autres ressources propres des collectivités territoriales représentent, pour chaque catégorie de collectivités, une part déterminantes de l'ensemble de leurs ressources ». On notera que la loi organique du 29 juillet 2004 est venue définir la notion de ressources propres comme le produit de certaines impositions.

La notion de décentralisation fiscale nous paraît appropriée pour rendre compte de la nécessité de renforcer les pouvoirs fiscaux des collectivités locales dans un souci de développement de la démocratie locale et de la responsabilité des élus locaux. Aussi, la reforme fiscale doit s'appuyer sur les notions de proximité et de visibilité. C'est en ce sens que la spécialisation prend toute son ampleur par ce qu'elle répond à ces différents impératifs et défis qui se posent actuellement à l'action des collectivités locales. Certains observateurs y voient d'ailleurs une manière d'introduire un concept encore méconnu, la responsabilité fiscale.

Divers scénarios peuvent être envisagés dans le cadre des modalités concrètes de mise en oeuvre de la spécialisation fiscale territoriale. Ainsi, l'une des pistes envisagée est celle qui attribue à la région la pleine compétence de la Taxe Intérieure des Produits Pétroliers(TIPP) et aux groupements intercommunaux la Taxe Professionnelle tandis qu'aux départements et aux commune reviendraient respectivement la Taxe Foncière et la Taxe d'Habitation rénovée.

D'autres types de scénarios de spécialisation fiscale peuvent être envisagés. Tout d'abords, l'institution d'une nouvelle imposition locale des entreprises (ILE) en remplacement de la taxe professionnelle et qui serait entièrement réservée aux communes et aux EPCI. Dans ce scénario, les départements seraient financés exclusivement par les taxes foncières et les régions par une fraction des droits de mutations à titre onéreux(DMTO) et une autre ressource fiscale qui se substituerait au coût net actuel de la TP pour l'Etat.

Ce scénario présente l'avantage d'une plus grande transparence et limite les effets négatifs de la concurrence fiscale verticale. Par ailleurs, en réservant l'intégralité de la nouvelle ILE, ce scénario permet de renforcer le lien entre les finances communales et l'implantation des entreprises. Ainsi, la fiscalité jouerait un rôle d'incitation à la bonne gestion des finances locales grâce à l'accentuation de la concurrence fiscale horizontale.

* 18 M. SOUCHARD - S. WAHNICH : La Communication politique locale

précédent sommaire suivant






Bitcoin is a swarm of cyber hornets serving the goddess of wisdom, feeding on the fire of truth, exponentially growing ever smarter, faster, and stronger behind a wall of encrypted energy








"L'ignorant affirme, le savant doute, le sage réfléchit"   Aristote