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Le contrat de commande dans les propriétés intellectuelles

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par Mohammed Youssef
Université Aix Marseille III Paul Cezanne  - M2 2009
  

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Chapitre 2 : l'équilibre des obligations entre les parties.

Le dynamisme du marché reposant sur l'idée de circulation, la propriété ne doit pas être figée. On perçoit donc l'opposition fondamentale entre la conception juridique créatrice de la propriété considérée comme absolue et la conception économique, la première reposant essentiellement sur la liberté de la non-exploitation et le droit direct sur l'oeuvre de la propriété, la seconde exigeant l'obligation d'utilisation de ce droit, ce qui diminue l'aspect protecteur du droit moral sur le terrain d'un contrat portant une cession explicite ou implicite169.

L'idée du marché va limiter la liberté du commandité sous l'influence de l'idée du marché, aussi elle va demander des conditions renforçant la logique de l'investissement et assurer l'équilibre des intérêts entre les deux partie dans le contrat.

Section 1 La restriction du droit absolu du créateur.

En ce qui concerne la propriété industrielle, le créateur n'ayant pas la qualité d'auteur, il n'a pas les caractéristiques uniques du droit moral170. Il est soumis dans ses relations contractuelles aux règles du contrat d'entreprise, ces règles obligent l'entrepreneur en vertu du contrat à faire ou à ne pas faire sous la contrainte de l'exécution forcée ou l'astreinte.

Pour cette raison, et compte tenu de notre étude concernant la spécificité du contrat de commande dans la propriété intellectuelle, nous allons à présent discuter les contraintes relatives au contrat de commande dans sa spécificité, en laissant de côté les cas dans laquelle nous appliquons les règles du contrat d'entreprise171.

Sous-section 1 - la restriction conventionnelle.

Le commanditaire exprime de façon plus ou moins précise ce qu'il attend du contrat. Jusqu'à quel point admettre qu'il dicte ses volontés ? On s'est demandé si, en son principe, l'intervention d'un tiers, serait-il cocontractant, n'était pas incompatible avec le droit d'auteur dans la mesure où l'activité du créateur postule l'indépendance et la maîtrise du choix créateur. A l'appui de cette thèse, l'argument du droit moral de l'auteur avait notamment été

169 ABELLO Alexandra, FRISON-ROCHE Marie-Anne : Droit et économie de la propriété intellectuelle, L.G.D.J, 2005. P. 4.

170 Ce droit donne l'auteur la possibilité de refuser l'exécution de contrat sans contrainte de l'exécution forcé

171 L'obligation essentielle de l'entrepreneur d'exécuter la prestation qui lui a été demandée en respectant les modalités convenues. Alors les parties dans le contrat peuvent préciser le délai de l'exécution, source fréquence de litiges et la nature de l'obligation, de moyen ou de résultat. Par conséquent, le commandité est invité à respecter les clauses de contrat.

mis en avant. Mais, comme l'a rappelé la cour de cassation, cette prérogative ne préexiste pas à l'oeuvre172, car le code de la propriété intellectuelle investit l'auteur de droits du fait de sa création. C'est donc lorsqu'elle prend forme, même si elle n'est pas définitive, que naît le droit moral173.

A- Les obligations acceptables par rapport de sa nature.

Le contrat peut-il faire naître des contraintes de nature à brider l'élan et l'inspiration créatrice du commandité ? La cour de cassation l'a admis à propos d'une commande d'oeuvre audiovisuelle pour laquelle l'auteur peut « au préalable librement consentir par convention à limiter sa liberté de création et s'engager en particulier à obéir aux impératifs d'une commande » 174.

Alors, les obligations vont-elles à l'encontre de l'activité créatrice et de la nécessaire indépendance qui doit y présider ?

La réponse mérite d'être nuancée car Il existe une variété de clauses définissant la commande à créer.

Des clauses générales peuvent laisser au commandité une liberté totale de création en ne précisant que le type d'oeuvre à créer.

Des clauses précises limiteront en revanche la liberté de création du commandité. Le commanditaire peut en effet imposer au commandité un certain nombre de contraintes. Outre le type, le format, le sujet ainsi que la manière de le traiter peuvent être imposés au commanditaire au moment de la conclusion du contrat.

Le contrat détermine donc le degré de la liberté de création et d'immixtion du commanditaire dans l'exécution de l'oeuvre.

C'était reconnaître que la création peut exister quoique réalisée dans un cadre contraint. Il est, dès lors, naturel que le commandité qui accepte la commande en respecte les obligations. Sa position d'auteur ne le soustrait pas à la règle de la force obligatoire des contrats175.

Point de vue jurisprudentiel.

Les directives ne doivent pas entraver de façon significative le créateur, car alors la convention pourrait être frappée de nullité. De quelle façon apprécier cet excès ?

172 Cass. 1er civ, D, 8 novembre 1989, n° 87-10.440.

173 S DENOIX DE SAINT MARC: P. 199.

174 Cass, 1er civ, D, 7avril 1987, n° 85-12.101, Bulletin 1987 I N° 124 p 93 (En l'espèce, l'état Gabonais avait passé commande à une société de télévision d'un film sur le Gabon destiné à en assurer la promotion et publicité. Une clause du commanditaire. Les auteurs avaient négligé de le consulter. Le fait était compréhensible, car leur reportage était assez critique sur le Gabon. Reprochant une constante volonté de dénigrement et des images tendancieuses, l'état gabonais soutenait que l'oeuvre était sans rapport avec ce qui avait été convenu).

175 S DENOIX DE SAINT MARC : P. 204.

Le degré de précision de l'oeuvre imposé au commandité par le commanditaire peut-il être considéré comme abusif ? Certaines conventions déterminent avec soin l'oeuvre à créer, jusque dans les formes, proportions, volumes, matériaux. La validité de ces accordes ne semble pas remise en doute, le commandité y ayant consenti librement176. Dans l'affaire de la sculpture commandée à l'artiste SCRIVE, le contrat indiquait « la hauteur, la dimension et l'espacement de ses divers éléments, le tout devant être exécuté en plastique armé coloré »177. Souvent, ces précisions ne font que reprendre des éléments tirés des projets ou propositions émanant exclusivement du commandité, au moment de la conclusion du contrat, auxquels le commanditaire donne son aval178. Mais quand bien même celui-ci interviendrait dans la description de l'oeuvre future, le contrat ne serait pas pour autant ébranlé.

Tout au contraire, la contrainte pèse de façon manifestement abusive lorsque le commandité
est soumis à des rythmes de production insupportables. Les juges ont estimé qu'une
convention imposant une cadence de production excessive était frappée de nullité absolue179.

M. SAVATIER souligne à quel point le contrat reflétait jusque dans ses termes et son langage le mépris pour l'art que pouvait avoir le marchand. << Il est inadmissible que, dans les obligations d'un artiste, l'esprit soit expressément réduit à une valeur marchande. Négliger le reste, c'est oublier que la loi y voit le principal du contrat »180. Dans une autre affaire, les juges ont décidé que « la cession des oeuvres futures par un peintre est licite dès lors qu'elle est limitée dans le temps et qu'elle ne s'accompagne pas d'exigences incompatibles avec le droit moral de l'artiste »181. C'est donc au cas par cas que le juge se penchera sur l'équilibre entre liberté de création et attentes du commanditaire, sachant que la jurisprudence n'est pas très abondante en la matière. Le fait peut être mis sur le compte de l'absence de réel conflit. Il arrive aussi que ce genre d'incidents trouve une issue à l'écart de la voie contentieuse, sur le terrain de la transaction.

B- Les obligations acceptables par rapport de sa qualification.

La considération que Le logiciel, spécifique et développé par un prestataire pour être utilisé par un client, est juridiquement un contrat d'entreprise. Même l'étendue des obligations devra être définie dans les clauses du contrat, et toutes les prestations associées au logiciel, telles que maintenance, formation, conseil, etc. peuvent être analysées comme des contrats

176 CA Paris, 11 juin 1997, RIDA, n°174, octobre 1997, P. 255.

177 TGI Paris, 14 mai 1974, RIDA, 1975 P. 219.

178 S. STROMHOLM : P. 320, n° 178.

179 << Comme contraire aux principes qui régissent la propriété intellectuelle, une telle convention entravant ainsi la liberté créatrice du commandité, tenu à respecter un rendement déterminé, ce qui est de nature à compromettre gravement la qualité de son oeuvre, sa réputation et son avenir ».CA Aix, 23 février 1965, D. 1966, P. 166. SAVATIER. RTD com. 1965.

180 SAVATIE René : Le droit de l'art et des lettres. R. Pichon et R. Durand-Auzias1953. N°. 168. P. 122

181 Cass. 1er civ, 19 janvier 1970, D. 1970. J. 483.

d'entreprise. Une telle qualification nous dit que le contrat peut comporter des clauses prévoyant l'étendue des droits accordés : soit la totalité des droits au profit du client, ce qui correspondra à une cession de droits incorporels ; soit une partie des droits accordés au profit du client, ce qui pourra correspondre à une concession de droits incorporels assimilable à un louage.

Le législateur a diminué la protection du commandité en soumettant le contrat de commande de logiciel aux droits communs, tant que nous somme sur le terrain du contrat d'entreprise, l'entrepreneur dans ce contrat doit respecter les conditions du contrat sans aucune liberté de création.

Sous-section 2 - La restriction extérieure de la volonté des parties.

Un certain nombre d'autres éléments peuvent éventuellement peser sur le créateur dans l'exercice de son travail et qui, cette fois, trouvent leur source en dehors du contrat de commande. L'oeuvre doit parfois se plier à des exigences diverses, respecter les règles d'urbanisme ou le délai de création ou livraison de l'oeuvre. Elle est parfois prohibée des prérogatives en raison de sa finalité.

A- Liberté de création et règles d'urbanisme en général.

L'oeuvre considérée en tant qu'objet matériel appartient à d'autres catégories juridiques plus générales. C'est un bien mobilier (pour les tableaux) ou immobilier (sculpture fixées au sol, création architecturale). S'agissant d'oeuvres d'art ayant une implantation fixe, il faut se demander si les règles d'urbanisme ont vocation à s'appliquer. S'agit-il d'une construction soumise en tant que telle aux règles du permis de construire ?

L'article L421-1 du code de l'urbanisme prescrit que : « quiconque désire entreprendre ou implanter une construction à usage d'habitation ou non, même ne comportant pas de fondations, doit, au préalable, obtenir un permis de construire ».

B- Liberté de créer et temps de création.

Si il y a un délai pour réaliser une oeuvre d'art, si ce délai est raisonnable, le commandité devra le respecter, sauf arrangement avec son cocontractant, ce qui arrive fréquemment.

D'une part la jurisprudence dit « est délicat d'imposer à un artiste de faire une oeuvre dans un temps déterminé car il n'est pas toujours maître de son inspiration »182.

182 Trib, civ, Charolles, 4 mars 1949, Gaz. Pal. 1949. 2. 176.

D'autre part la cour d'appel en examinant la clause du délai dans un contrat de commande a souligné « est licite le contrat par lequel le créateur s'engage à fournir périodiquement un nombre déterminé d'oeuvres pendant une certaine durée »183.

Si le principe d'une obligation contractuelle de créer dans un certain délai est admis, le procédé de l'astreinte consistant à impartir un délai sous contrainte pécuniaire est en revanche exclu184.

Par conséquent, ce n'est pas la volonté des parties qui détermine le délai ou sa correspondance avec l'inspiration du créateur, mais c'est le juge de fonds et selon les faits, cas par cas.

C- La délimitation de l'application du droit de suite.

L'article L.122-8 al 2 « on entend par oeuvres originales au sens du présent article, les oeuvres créées par l'artiste lui-même et les exemplaires exécutés en quantités limitées par l'artiste lui-même ou sous sa responsabilité ».

La cour d'appel a définit l'oeuvre originale qui bénéficie du droit de suite comme « qui a été créée de la main même de l'artiste, qui est sa reproduction personnelle ou qui est la reprise par un procédé technique spécial d'une oeuvre préalablement et matériellement conçue par l'artiste lui-même » 185.

La cour rappelle que « dans la mesure où la loi institue un droit exorbitant de droit commun contraignant la propriété légitime d'un objet à payer à l'auteur ou à ses héritiers un droit lorsqu'il l'aliène, ce droit devrait être interprété strictement ».

Un avis doctrinal après le rejet de cette décision par la cour de cassation186 va élargir la définition de l'oeuvre originale « l'oeuvre qui aura été réalisée à partir des dessins de l'artiste ou de ses marquettes, selon ses instructions et sous son contrôle, de telle sorte que dans son exécution même, l'oeuvre porte l'empreinte de sa personnalité et se distingue par là d'une simple reproduction »187.

Il est nécessaire de dire que vis-à-vis de contrat de commande concernant la propriété industrielle, où le droit moral de créateur ne donne au commandité la même position protectrice de l'auteur, l'idée du marché domine ce domaine de la propriété pour qu'elle laisse à la liberté des parties, le choix de déterminer la nature du contrat et les obligations

183 CA Paris, 15 novembre 1966, D.1967.483.

184 CA Paris, 4 juillet 1865, DP, 1865. 2. 201.

185 CA Paris, 28 janvier. 1991, RIDA, 1991, P. 141.

186 Cass. 1er civ. 13 octobre 1993, D 1994, jurispr. P. 138.

187 F.GREFFE, P-B GREFFE: P. 373.

conventionnelles conformément au droit commun, sans prise en compte, de la qualité de créateur.

Par conséquent le contrat de commande, selon sa finalité, va s'encadrer en deux manières :

1. la commande d'oeuvre qualifié comme une oeuvre originale, donc le commandité a la qualité d'auteur, on applique les règles de contrat de commande en droit d'auteur.

2. l'oeuvre n'est pas originale, en ce cas on applique les règles communes des contrats.

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"Ceux qui vivent sont ceux qui luttent"   Victor Hugo