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La protection des droits de la personne humaine en République Centrafricaine

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par Marius Judicael TOUATENA SIMANDA
Université de Bangui - Maitrise en droit public 2012
  

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B/ Le juge judiciaire

Les juridictions judiciaires ont pour mission de protéger les droits fondamentaux en poursuivant quatre objectifs principaux : réprimer les faits commis par le coupable, faire cesser et organiser la réparation du préjudice subi par la victime et, enfin, prévenir la réalisation du dommage.

L'article 81 de la Constitution centrafricaine de 2004 dispose expressément que le pouvoir judiciaire est gardien des libertés et de la propriété, il est tenu d'assurer le respect des principes consacrés comme bases fondamentales de la société par la présente Constitution. A ce titre, les juges de l'ordre judiciaire (juge civil et pénal) sont les responsables naturels de la protection juridictionnelle des droits et libertés.

Ainsi, de son côté, le juge judiciaire est associé, par le texte même de la Constitution, à la protection des droits et libertés de la personne humaine.

35 Décision no234 du 25 octobre 2005

Le démembrement ou bien les aspects de la vie privée qui doivent subir cette protection s'articulent comme suit : la vie affective, sentimentale et conjugale ; la maternité et paternité ; l'intimité corporelle qui induit l'état de santé ; l'état civil ; le secret de correspondance (même pour les majeurs protégés), de messagerie ; le patrimoine, situation de fortune, biens personnels, compétences professionnelles, image des biens ; la religion, opinions philosophiques, sectes ; le domicile, adresse ; les fichiers et voix. La violation de la vie privée que le juge civil doit réprimer touche également les enquêtes. Considéré comme illicite par le juge civil le fait de faire épier, surveiller et suivre une personne. La protection de la vie privée va de pair au respect de la présomption d'innocence. Ceci se traduit lorsqu'une personne est, avant toute condamnation, présentée publiquement comme coupable de faits faisant l'objet d'une enquete ou d'une instruction judiciaire. Le juge peut, même en référé, sans préjudice de la réparation du dommage subi, prescrire toutes mesures, telles que l'insertion d'une rectification ou la diffusion d'un communiqué, aux fins de faire cesser l'atteinte à la présomption d'innocence, et c'est aux frais de la personne, physique ou morale, responsable de cette atteinte.

En plus de la protection de la vie privée du particulier, le juge civil protège également la vie privée du salarié.

En revanche, concernant les contentieux relatifs à la protection des individus face à l'administration, la compétence du juge judiciaire n'est pas exclusive, mais reste partagée avec le juge administratif, contrairement aux dispositions du Nouveau Code de procédure pénale qui prévoient pourtant l'exclusivité de la compétence judiciaire.

Ainsi, comme son homologue français, la compétence du juge civil centrafricain a en outre été élargie par la Cour Constitutionnelle à la protection de l'inviolabilité du domicile grace à une interprétation audacieuse de l'art.14 al.2 de la Constitution de 200436.

Alors, la seule constatation de l'atteinte aux droits et libertés de la personne humaine ouvre droit à réparation. Lorsque l'administration commet une inégalité d'une gravité telle qu'elle se place complètement en dehors du champ des pouvoirs qui lui sont consentis légalement (la voie de fait et l'emprise irrégulière), la garantie de l'intervention d'une juridiction administrative lui soit refusée, alors, on relève la compétence des juridictions judiciaires. Le juge judiciaire est amené à réparer le préjudice subi ; il le fait toute fois en étroite collaboration avec le juge administratif, lequel est seul compétent pour apprécier la légalité d'actes administratifs en cause. (TC, 16 juin 1964, Clément, Rec.796).

36 Article 14 al.2 de la Constitution de 2004 : « Le domicile est inviolable. Il ne peut y être porté atteinte que par le juge et, s'il y a péril en la demeure, par les autres autorités désignées par la Loi, tenues de s'exécuter dans les formes prescrites par celle-ci ».

L'intervention du juge civil est alors de nature à permettre une protection plus efficace du justiciable

En présence d'une voie de fait (dans l'hypothèse où l'administration a, par un acte illégal, porté une atteinte grave au droit de propriété ou à une liberté fondamentale comme la liberté de la presse ou la liberté de réunion), le juge civil bénéficie d'une compétence élargie (il use l'exclusivité de sa compétence), ce qui peut aller jusqu'à enjoindre à l'administration de faire cesser la voie de fait et de réparer le préjudice.

Pour l'emprise irrégulière, considérée comme étant la prise de possession par l'administration sans titre légal à titre provisoire ou définitif d'une propriété privée, le juge judiciaire se voit attribuer une compétence moins large. Celle-ci est contraire à ce qu'affirme l'art. 14 de la Constitution du 27 décembre 2004. Pour cet état de fait, la victime de la dépossession doit saisir le juge judiciaire pour demander réparation du préjudice subi. Nous suggérons l'affaire MALIK Jérôme comme illustration.

`' En l'espèce, le sieur MALIK, attaché principal d'administration en service au Ministère de l'Education National, acquière régulièrement le 28 juin1976 le titre foncier no3382 de sa propriété situé sur la route de

D amara (PK 12). En janvier 1988, les Services du Cadastre et des Domaines morcèlent une partie du terrain qu'ils affectent à la Mairie de Bégoua pour la construction d'un nouvel hôtel de ville sans consentement du propriétaire et même à son insu. Lésé, le sieur MALIK saisit le 05/08/1992 la Chambre Administrative de la Cour Suprême, laquelle par la décision du 08/08/1992 se déclare incompétente. C'est sur la base de cette décision que le requérant se tourne vers le juge judiciaire qui n'a pas hésité de faire droit à sa demande»37

Il est à noter que le juge pénal est lui aussi confronté à des atteintes aux droits fondamentaux. Il l'est d'une part en punissant et d'autre part en protégeant.

La compétence du juge judiciaire est exclusive dans le domaine de la répression. Ainsi, chaque fois que la violation d'une liberté publique est sanctionnée pénalement, seul le juge judiciaire (ici, le juge pénal) peut prononcer une condamnation, ou une relaxe, même si le prévenu est un agent public.

La Loi n°10.001 du 06 janvier 2010 portant Code Pénal Centrafricain punit, et parfois de manière particulière lorsqu'il s'agit d'agent de l'Etat, les atteintes à la liberté individuelle (art. 336-338 du C.P), les tortures, actes de barbarie et autres traitements cruels, inhumains et dégradants (art. 118-120 du C.P), les crimes contre la personne humaine (art. 152-157), des crimes et délits contre la Constitution (331- 335).

37TGI de Bangui, 17 juin 1997, MALIK Jérôme C/Min des TP

Le Code de Procédure Pénale centrafricain, comme le Code de Procédure Pénale français, énonce que seules les juridictions judiciaires sont compétentes pour se prononcer sur tous les cas de détention arbitraire que la Constitution de 2004, dont son article 3 prohibe par principe. Seul le juge pénal, au nom du principe de plénitude de juridiction, peut apprécier la légalité des actes pris par l'administration (Règlements, décrets) servent de fondement aux poursuites et en décider l'annulation s'il l'estime leur contenu illégal. Cependant, il ne dispose pas du pouvoir étant réservé aux juridictions administratives. D'ailleurs, c'est lui qui assure le respect de l'art.81 de la Constitution de 200438 en s'opposant par exemple aux détentions arbitraires (art.3 al.3 de la Constitution de 2004), à l'hospitalisation abusive des malades mentaux ou aux séquestrations des personnes (art.97-101 du C.P centrafricain de 2010).

Comme exemple de détention arbitraire, nous pouvons illustrer le cas de l'affaire William et autres de la République Démocratique du Congo immigrés en RCA.

`'En l'espèce, le sieur William, immigré en 1995 en RCA, cireur de chaussure de son état a eu la malchance un jour (janvier 2000) de cirer la chaussure d'un Gendarme, lequel lui reproche d'avoir endommagé ses chaussures et lui demande une chaussure neuve en compensation. N'arrivant pas à satisfaire la demande du Gendarme, le sieur William fût arrêter et détenu dans les locaux de la Gendarmerie Nationale. Face à cela, à défaut d'une chaussure neuve, son frère parti acheter une autre

chaussure à la friperie et donna au Gendarme prétendument lésé après

des excuses préalablement faites. Celui ci a considéré ce geste comme

étant une injure et inflige le meme sort de William à son frère.» La question qu'on se pose est donc de savoir si le fait de mal cirer une chaussure constitue en soi une infraction possible d'emprisonnement ? Le juge en a répondu par une négation en l'affaire. Et donc ceci est considéré comme étant illégal et constitue ce qu'on appelle une détention arbitraire.

En revanche, les voies juridictionnelles internationales s'ouvrent également à la victime même s'il existe réellement les juridictions internes compétentes de protection des droits de la personne humaine. C'est ainsi qu'on constate actuellement l'émergence remarquable d'une justice pénale internationale, d'un système de coopération de justice entre les Etats qui constituent une innovation sans doute. Mais tout ce recours doit se présenter sous respect du principe ou de procédure imposés par elles.

38

Article 81 de la Constitution de 2004 : « Le pouvoir judiciaire, gardien des libertés et de la propriété, est tenu d'assurer le respect des principes consacrés comme bases fondamentales de la société par la présente Constitution ».

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"En amour, en art, en politique, il faut nous arranger pour que notre légèreté pèse lourd dans la balance."   Sacha Guitry