Paragraphe 2 : Les difficultés face aux usagers
Nous examinerons d'abord le cas du suspect (A) ensuite celui du
conseil (B)
A- Le cas du suspect
Certains suspects sont abandonnés à eux-mêmes
dans les unités de police ou de gendarmerie. D'autres, au moment de leur
audition décident qu'ils ne parleront qu'en présence
57 Voir à ce sujet le code pénal dans
ses articles 134 et 142 qui traitent respectivement de la corruption et de la
concussion.
de leur avocat58. Après une longue attente,
aucun conseil ne se présente. Que doit faire l'OPJ dans ce cas ? Les
délais de garde à vue s'épuisent et aucun avocat ne se
présente. Certains OPJ se décident à déferrer le
suspect au parquet sans leurs dépositions. Il y a dans ce cas vice de
procédure car la loi demande qu'avant d'être gardé à
vue, le suspect doit être entendu par l'OPJ. Cette situation rend
difficile la mission de l'OPJ. Le suspect par cette méthode bloque
l'évolution de la procédure car son avocat n'est pas toujours
là59. Nous saluons l'arrivée de la loi n°
2009/004 du 14 avril 2009 portant organisation de l'assistance judiciaire au
Cameroun. Mais l'assistance judiciaire ne devrait pas rester seulement au
niveau des tribunaux et des Cours, elle devrait s'étendre aux
unités de police et de gendarmerie. L'administration pourrait commettre
des avocats d'office près les unités de police et de gendarmerie
afin de pallier ces difficultés60. Les gardés à
vue malades ou blessés sont souvent abandonnés par leurs amis et
familles. Ils ne peuvent bénéficier d'une alimentation ni des
soins médicaux. C'est l'une des difficultés que connaît
l'OPJ. Le suspect abandonné, conduit à l'hôpital ne peut
recevoir les soins gratuitement car le personnel sanitaire exige le
dépôt d'une somme d'argent avant le début des
soins61. L'OPJ ne disposant pas de budget à ce sujet. Il
existe des cas où le gardé à vue décède
faute de soins. Nous pensons que ce droit aux soins médicaux pouvait
s'accompagner d'une mesure qui oblige les centres hospitaliers publics à
recevoir et à soigner gratuitement les suspects abandonnés
à eux-mêmes dans les unités de police ou de gendarmerie.
Une autre difficulté survient lorsqu'il faut nourrir ces
suspects abandonnés par leur famille et leurs amis sans visite.
L'article 122 al 4 du CPP dispose que l'Etat assure l'alimentation
des personnes gardées à vue. Toutefois, ces personnes sont
autorisées à recevoir quotidiennement de
58 L'article 63-4 du CPP français dispose
que « Dès le début de la garde à vue, la personne
peut demander à s'entretenir avec un avocat. » Si elle n'est pas en
mesure d'en désigner un ou si l'avocat choisi ne peut être
contacté, elle peut demander qu'il lui en soit commis un d'office par le
bâtonnier.
59 Le CPP français a prévu la commission
d'avocat d'office afin de pallier à ce genre de difficulté.
60 En France cette difficulté est
réglée par le CPP. Ainsi l'article 63-4 c du CPP français
impose à l'OPJ de prendre contact avec l'avocat désigné ou
informe par tous moyens et sans délai le bâtonnier de la demande
de commission d'un avocat d'office.
61 En dehors du dépôt d'une somme
d'argent, il faut bien de l'argent pour l'achat des médicaments au
suspect malade.
leur famille ou de leurs amis les moyens nécessaires
à leur alimentation et à leur entretien. Au cas où ces
personnes n'ont ni visite de leur famille ni de leurs amis, il revient à
l'Etat d'assurer leur alimentation. La mise en pratique de ce volet de l'art.
122 du CPP viendra résoudre une des difficultés que rencontre
l'OPJ dans l'accomplissement de sa mission.
La promiscuité dans les chambres de sûreté
est aussi un réel problème pour l'OPJ. Ces chambres sont le plus
souvent très exigues et on y dénombre parfois 30 à 50
voire même 70 suspects serrés dans un local de 3 à 4
mètres carrés. Les chambres de sûreté pour mineurs
n'existent pas dans nos unités de police ou de gendarmerie. C'est
à peine qu'on en trouve pour le sexe féminin. Ceux-ci se
retrouvent dans le même local que les gardés à vue du sexe
opposés avec tout ce que cela comporte comme risque de viol. Les mineurs
aussi souffrent de la même façon que les gardées à
vue de sexe féminin. Nous exhortons les autorités à
construire des chambres de sûreté (avec toilettes)
différentes pour ces trois catégories de personnes gardées
à vue.
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