SECTION 2 : LA SELECTIVITE QUANT A L'ORGANE EN CHARGE
DE L'ENQUETE DE POLICE JUDICIAIRE CONTRE L'OPJ ET LE PRIVILEGE
DE JURIDICTION
Avant de voir le privilège de juridiction
accordé à l'OPJ par le code de procédure pénale
(paragraphe 2), nous allons étudier la sélectivité quant
à l'organe en charge de l'enquête de police judiciaire contre
l'officier de police judiciaire (paragraphe 1).
Paragraphe 1 : La sélectivité quant à
l'organe chargé de l'enquête de police judiciaire contre
l'OPJ
Cette sélectivité est contenue dans une instruction
inter ministérielle (A) et nous verrons le cas particulier de la
Sûreté Nationale (B).
A- L'instruction inter ministérielle
Une instruction datant du 16 octobre 1964 inter
ministérielle sur les rapports entre la gendarmerie115,
l'armée et la police a décidé dans sa partie III sur les
règles de compétence en ce qui concerne les infractions aux lois
et règlements qu'en cas d'incident ou d'infraction auquel des gendarmes
ou des militaires et des civils, sont mêlés, l'enquête
revient à la gendarmerie. Toute plainte ou dénonciation
adressée par des civils à la police pour un incident ou une
infraction mettant en cause un gendarme ou un militaire est envoyée au
service de gendarmerie compétent.
115 Circulaire interministérielle n°
8/VP/6/INT/2308/MINFA/362/PS/S du 16 octobre 1964, détermine la
compétence de chacun des deux corps uniquement en fonction de l'auteur
de l'infraction.
En cas d'incident ou d'infraction mettant en cause des
policiers et des civils la poursuite de l'enquête revient à la
police. Toute plainte ou dénonciation adressée à la
gendarmerie pour un incident ou une infraction mettant en cause un policier est
envoyée au service de la police compétent.
En cas d'incident ou d'infraction mettant en cause des
gendarmes, des militaires,des policiers et des civils, la gendarmerie et la
police sont respectivement saisis des faits intéressant leurs
représentants116.
La finalité même de cette instruction a pour but
de mettre un terme aux incidents malheureux (qui sont souvent arrivés)
entre ces différents corps afin que règne entre eux une franche
coopération dans l'intérêt supérieur de la Nation
camerounaise.
B- Le cas particulier de la Sûreté
Nationale
Dans le cas particulier de la Sûreté Nationale,
il convient de noter qu'après avoir effectué les diligences
relatives à l'enquête de police judiciaire contre l'officier de
police judiciaire, le chef de corps dispose d'un pouvoir d'appréciation
de l'opportunité de déférer le policier fautif. Ainsi une
circulaire du Délégué Général à la
Sûreté Nationale n° 0013/DGSN du 11 mars 1982 au sujet des
poursuites judiciaires contre les fonctionnaires de la police dispose que :
« en cas de poursuites judiciaires dirigées contre les
fonctionnaires de la police, soit pour des faits qui leurs sont personnellement
imputables, soit pour des actes accomplis dans l'exercice ou à
l'occasion de l'exercice de leurs fonctions, ceux-ci ne peuvent être
déférés au parquet qu'après avis du chef de corps
auquel la procédure doit être communiquée d'urgence pour
lui permettre de statuer ». Ce que nous pouvons noter ici c'est que cette
circulaire avait été prise au moment du parti unique,
période où l'Etat était tout puissant, on ne parlait pas
de droit de l'Homme et les libertés
116 Voir à ce sujet cette circulaire pour plus de
détails sur les règles de coopération entre la
Sûreté Nationale, la gendarmerie et l'armée.
individuelles n'étaient pas garanties. Le DGSN qui doit
statuer en dernier ressort si le policier doit être
déféré ou non au parquet, peut opter pour la
dernière solution et que fera la victime ? Cette circulaire permet au
chef de corps de la police de bloquer le contentieux pénal des
fonctionnaires de police. Cela pose un sérieux problème. Mais
nous souhaiterions que le chef de corps de la police laisse la justice
s'exercer en toute liberté en évitant de l'entraver. Cette
circulaire ne cadre pas avec le contexte actuel de notre société.
Il faut aussi noter que à cette période une tension
régnait entre la police et la justice au point où un chef
d'unité était allé enlever certains de ses collaborateurs
traduits en justice en pleine audience. Mais de nos jours cette circulaire a du
mal à s'appliquer car nous sommes dans un Etat de droit et la garantie
des libertés individuelles est son credo. Nous sommes tous égaux
devant la loi.
|