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La faute de l'Administration en matière foncière au Cameroun

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par Ariane Lidwine NKOA NZIDJA
université de Yaoundé II - Diplôme d'études approfondies en droit privé 2008
  

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B - La fragilisation de la force probante du titre foncier

L'immatriculation a pour objet de placer un immeuble « sous l'empire du régime des livrets fonciers »94(*). Elle se concrétise par la remise d'un titre foncier qui aux termes de l'article 1 du décret 76/165, « est la certification officielle de la propriété immobilière ». Le titre foncier constitue donc l'acte de naissance du droit de propriété immobilière. Ainsi, s'il est entaché de vice, le processus de maturation, la vie de ce droit de propriété ne pourrait qu'en être affectée.

Acte délivré par une autorité administrative compétente, et constituant la seule preuve de la propriété foncière,  le titre foncier est inattaquable, intangible, définitif. De ce fait, le titre foncier est requis non seulement  « ad probationem », c'est-à-dire pour faire la preuve qu'on est propriétaire de l'immeuble, mais aussi, et surtout « ad validitatem », c'est-à-dire, pour consolider son droit de propriété et le rendre opposable à toutes autres prétentions concurrentes.

De ce point de vue, la nature juridique de cet acte est incontestable et lourde de conséquences. Néanmoins, cette force probante du titre foncier est conditionnée par une immatriculation dénuée d'irrégularités, étant entendu que toute irrégularité sape les bases et fondements de cet acte conformément à l'article 2 du décret suscité.

A la lecture de ce texte, il est énoncé de manière claire et ferme que : « 

1. toute personne dont les droits ont été lésés par suite d'une immatriculation, n'a pas d'autres recours sur l'immeuble, mais seulement en cas de dol, une action personnelle en dommages-interets contre l'auteur du dol.

2. l'action est portée devant la juridiction civile du lieu de situation de l'immeuble.

3. toutes fois, le ministre chargé des affaires foncières peut , en cas de faute de l'administration, résultant notamment d'une irrégularité commise au cours de la procédure d'obtention du titre foncier, et au vu des actes authentiques produits, procéder au retrait du titre foncier irrégulièrement délivré ».

La faute de l'administration constitue l'une des causes profondes de dénégation, de contestation du titre foncier. L'alinéa 3 de ce texte jalonne ainsi la remise en cause des caractères définitifs, intangibles et inattaquables liés au titre foncier.

Le titre foncier est considéré comme définitif, dans la mesure où le titre foncier clôture une procédure minutieuse, entourée de publicité, par conséquent, ne peut plus être remis en question. Ainsi, le professeur TJOUEN relève que « le titre foncier est définitif, car il marque la fin de la procédure d'immatriculation. Son obtention est aux termes de l'article 123 du décret du 21 Juillet 1932, « le point de départ des droits réels et charges foncières existant sur l'immeuble au moment de l'immatriculation». On n'attend plus rien d'autre pour être déclaré propriétaire de l'immeuble [...], on n'a plus le droit de le mettre en cause » ;

Inattaquable, car le titre foncier met fin à toutes prétentions concurrentes et aucune action portant sur ce document ne peut être recevable, en clair, cela signifie que dès lors qu'il est délivré, aucun recours n'est plus admissible, « la seule forme de contestation qui soit admise est, en cas de dol, l'action personnelle en dommages et intérêts contre l'auteur du dol, ouverte à toute personne dont les droits ont été lésés »;

Intangible, parce qu'on ne peut ni retrancher ni ajouter des mentions au titre foncier établi. C'est un acte absolu, qui fait foi de la preuve de la propriété. Selon Monsieur Jean-Marie NYAMA, « cela veut dire qu'en principe, on ne peut plus, ni ajouter, ni retrancher les mentions qu'il contient », l'auteur ajoute : « cela signifie aussi que la force probante que la loi attache à l'immatriculation et aux énonciations portées sur le titre au moment même de l'immatriculation est absolue ». Cette figure est illustrée par les propos du professeur TJOUEN lorsqu'il déclare : « il s'agit ici de savoir si on est encore libre de « toucher», c'est-à-dire d'ajouter ou de retrancher certaines mentions déjà portées sur le titre foncier puisqu'il peut y avoir des erreurs humaines ou des fautes intentionnelles. Le législateur a répondu par la négative pour affirmer davantage l'absolutisme de la force probante du titre foncier ».

Le système de l'immatriculation s'accompagne à ne point douter d'effets très énergiques en dotant une base incontestable au titre foncier établi. Et Monsieur AMBIALLET ajoute que « (...) tous les titres antérieurs à l'immatriculation sont annulés pour faire place au titre foncier qui porte en lui la preuve du droit du propriétaire. Il ne s'agit plus après l'immatriculation, de chercher, ni même de savoir, comment celui-ci a pu, antérieurement acquérir son droit. Est-ce par voie de succession, de donation, de vente ? Peu importe. Il tient désormais son droit d'immatriculation. L'immatriculation purge les droits antérieurs qui ne seraient pas mentionnés au titre foncier (...) ».95(*)

La faute de l'administration constitue alors une exception à cet absolutisme, car à elle seule, elle entraîne le retrait du titre foncier. C'est dire qu'elle constitue une dérogation exceptionnelle à la force probante et aux valeurs irréfragables du titre foncier. La faute fragilise le pesant d'or du précieux « sésame » qu'est le titre foncier, détruit les bases et les fondements de l'édifice institutionnel, en ouvrant des brèches à la contestation de l'acte juridique irrégulièrement délivré, lui retire ainsi sa force inébranlable sans laquelle le régime foncier de l'immatriculation serait sans garantie et sans assiette.

* 94 Victor Gasse, Régimes fonciers africains et malgaches : évolutions depuis l'indépendance, LGDJ Paris 1971 p.52

* 95 96 V. Charles AMBIALLET,  op. cit.

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