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L'effectivité des droits de l'enfant en Cote d'Ivoire


par Arsène NENI BI
Université Jean Moulin Lyon 3 - Doctorat en droit public 2018
  

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A. UN CADRE PENAL HYBRIDE APPLICABLE AUX MINEURS DELINQUANTS

A l'instar de la France, qui fut la première a adopté une loi sur « l'enfance délinquante » en 1945447, la Côte d'Ivoire, ancienne colonie française s'est elle aussi intéressée à la question de ces enfants ou du moins, n'a fait que lui emboiter le pas. C'est dans cet élan, que quelques articles du code pénal et du code de procédure pénale, font mention de protection de l'enfant en conflit avec la loi. Plus précisément, deux lois, la loi n° 69-371 du 12/08/1969 relative au code pénal et celle n° 81-640 du 31/07/1981 relative au code de procédure pénale, consacre un titre entier à l'enfance délinquante.

446 Celui-ci est protégé par la loi de 1981 du code pénal ivoirien, qui assure une protection générale à tout individu et spécifiquement à l'enfant. Ce dernier bénéficie à cet effet, lui aussi de toute la protection prévue par le droit pénal. Il jouit d'une protection juridique et judiciaire qui doit respecter ses droits et ses intérêts en toute situation et circonstance comme prévu par la Déclaration Universelle des droits de l'Homme en son article 25 alinéa 2. La loi pénale ivoirienne prévoit une protection accrue aux enfants victimes de violences, lorsqu'il se trouve en danger moral et social.

447 BOHUE (Y.), La protection pénale de l'enfant en droit ivoirien, thèse présentée et soutenue publiquement le 7 mars 1992 à l'Université nationale de Côte d'Ivoire, faculté de droit, p.6.

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Le caractère hybride du cadre pénal applicable aux mineurs est perceptible à travers l'affirmation d'une responsabilité pénale des mineurs peu ou prou conforme aux normes internationales (1) et l'application de règles de droit commun aux mineurs dans le cadre de l'enquête préliminaire (2).

1. Une responsabilité pénale des mineurs peu ou prou conforme aux normes internationales

Aux termes de l'article 14 du code pénal ivoirien, « est mineure au sens de la loi pénale, toute personne âgée de moins de 18 ans lors de la commission de l'infraction ».

Il appert de cet article que la minorité constitue une cause d'exclusion ou d'atténuation de la responsabilité pénale. L'âge de 18 ans fixé par le législateur ivoirien comme seuil maxima au-delà duquel une personne n'est plus considérée comme un mineur est en adéquation avec les dispositions de la Convention relative aux droits de l'enfant448 et de la Charte africaine des droits et du bien-être de l'enfant449.

L'article 40 de la CDE prévoit qu'à ce seuil maxima de responsabilité pénale corresponde un seuil minima. L'article 4.1 des règles de Beijing ajoute que ce seuil d'âge ne doit pas être fixé trop bas, eu égard au manque de maturité affective, psychologique et intellectuelle du jeune mineur. Un tel seuil d'irresponsabilité pénale des mineurs a aussi été prévu dans l'article4.1 des Règles de Beijing ainsi que dans l'article 17.4 de la Charte Africaine sur les droits et le bien-être de l'enfant. L'article 11.a des RPMPL, ne fixe aucun critère relatif à la détermination de ce seuil par le législateur de chaque État. Il laisse ce dernier libre de fixer ce seuil en fonction de ses réalités sociales.

L'interprétation de l'article 757 alinéa 3 du Code de procédure pénale (CPP) ivoirien laisse entendre que ce n'est qu'à partir de 13 ans que le mineur est suffisamment conscient des actes qu'il pose pour être susceptible de se voir appliquer une sanction pénale.

448 La Convention relative aux droits de l'enfant a été adoptée par l'Assemblée générale des Nations Unies le 20 Novembre 1989. Elle a été ratifiée par la Côte d'Ivoire en date du 4 février 1991. L'article 1 établit qu'un « enfant s'entend de tout être humain âgé de moins de dix-huit ans, sauf si la majorité est atteinte plus tôt en vertu de la législation qui lui est applicable ».

449 L'article 2 de la charte Africaine sur les droits et le bien-être de l'enfant.

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Cependant, cette limite d'âge fixée à 13 ans constitue t'elle le seuil minima de responsabilité pénale ? Si l'on lie la responsabilité pénale à l'administration d'une peine, ce seuil d'âge de moins de 13 ans constitue effectivement le seul minima de responsabilité pénale. Cependant, l'article 771 al.2 du CPP dispose que les mineurs âgés de moins de 13 ans seront susceptibles d'être détenus préventivement s'ils sont soupçonnés d'avoir commis un crime.

Sur le critère lié à la tranche d'âge, le code pénal ivoirien procède à une catégorisation des mineurs ; ainsi, il précise, en son article 116 que :

« - les faits commis par un mineur de 10 ans450 ne sont pas susceptibles de qualification et de poursuites pénales ;

- Le mineur de 13 ans bénéficie de droit, en cas de culpabilité, de l'excuse absolutoire de minorité451 ;

- Les mineurs de 10 à 13 ans ne peuvent faire l'objet que des mesures de protection, d'assistance, de surveillance et d'éducation prévues par la loi ;

- L'excuse atténuante452 ou absolutoire de minorité bénéficie aux mineurs de 16 à 18 ans dans les conditions prévues par le code de procédure pénale. »

Il appert de cet article, que seuls les mineurs de moins de 10 ans sont totalement exempts de toute responsabilité pénale. Quant aux mineurs dont l'âge oscille entre 10 et 13 ans, ils devront répondre de leurs actes devant une juridiction ; cette juridiction saisie, ne pourra que prononcer des mesures de protection, d'assistance, de surveillance et d'éducation qui sont prévues à l'article 783 du code de procédure pénale, à l'exclusion de toute condamnation pénale. Même si cette catégorie de mineurs ne peut être sanctionnée par une peine, réservée aux mineurs âgés de plus de 13 ans, l'existence de mécanismes éducatifs pouvant être actionnés à leur égard par un juge, démontre la possibilité pour une juridiction de reconnaître

450 Pour éviter toute confusion quant à l'interprétation de l'article 116 du code pénal, relevons que selon l'article 14 du code pénal, « les mineurs de 10, 13 et 16 ans sont ceux qui n'ont pas atteint ces âges lors de la commission de l'infraction ». Il s'agit donc des mineurs de moins de 10, 13 et 16 ans et non pas de 10, 13 et 16 ans accomplis comme on pourrait le croire à la première lecture.

451 Au sens de l'article 10 du code pénal (Livre premier), une excuse absolutoire consiste en « toute raison limitativement prévue et définie par la loi et dont l'admission, sans faire disparaitre l'infraction, entraine une dispense ou une exemption de peine. ».

452 Au sens de l'article 10 du code pénal (Livre premier), une excuse atténuante consiste « en toute raison limitativement prévue et définie par la loi et dont l'admission, sans faire disparaître l'infraction, entraine une atténuation obligatoire par la peine encourue ».

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la responsabilité pénale des mineurs de moins de 13 ans. Cependant, dans l'hypothèse où un mineur de 13 ans est poursuivi pour crime453, il peut faire l'objet d'un placement provisoire dans une maison d'arrêt par ordonnance motivée du juge des enfants. Quant aux mineurs âgés de plus de 13 ans, ils peuvent être poursuivis et condamnés pénalement.

Il convient de faire quelques précisions : la convention relative aux droits de l'enfant454, la Charte Africaine des droits et du bien-être de l'enfant455 accorde aux États, la latitude de déterminer l'âge minimum au-dessous duquel les enfants seront présumés n'avoir pas la capacité d'enfreindre la loi pénale. Toutefois, bien que non contraignantes, les règles de Beijing456, règles nécessaires au nom de l'intérêt supérieur de l'enfant, établissent que le seuil de responsabilité pénale « ne doit pas être fixé trop bas eu égard aux problèmes de maturité affective, psychologique et intellectuelle ». En fixant le seuil de responsabilité pénale à 10 ans et en prévoyant l'octroi de mesures protection, d'assistance, de surveillance et d'éducation à l'égard des mineurs de 10 à 13 ans, le législateur ivoirien fait montre de cohérence avec les principales dispositions internationales en la matière, et ce , contrairement à l'enquête préliminaire marqué par une application de règles de droits commun aux mineurs.

2. Une application de règles de droit commun aux mineurs dans le cadre de l'enquête préliminaire

Le code de procédure pénale ivoirien ne contient pas de dispositions spécifiquement applicables aux mineurs dans le cadre de l'enquête préliminaire. Celle menée par la police judiciaire devant faire l'objet de développements particuliers dans le cadre de développements ultérieurs, nous examinerons ici quelques données textuelles prévues dans le cadre de l'information judiciaire.

453 Article 771 du code de procédure pénale ivoirien.

454 L'article 40 de la Convention relative aux droits de l'enfant établit que « les Etats parties s'efforcent(...) d'établir un âge minimum au-dessous duquel les enfants seront présumés n'avoir pas la capacité d'enfreindre la loi pénale ».

455 L'article 1 (4) de la Charte Africaine des droits et du bien-être de l'enfant établit qu'un « âge minimal doit être fixé en deçà duquel les enfants sont présumés ne pas avoir la capacité d'enfreindre la loi pénale ».

456 Article 4.1 de l'ensemble de règles minima des Nations Unies concernant l'administration de la justice pour mineurs (Règles de Beijing) adoptées par l'Assemblée générale des Nations Unies le 29 novembre 1985. Ces règles de protection des mineurs sont des recommandations formulées par l'Assemblée générale des Nations Unies et elles n'ont aucune force contraignante à l'égard des Etats.

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Commençons par les mesures restrictives de liberté à caractère provisoire prises au cours de l'information. Elles sont de deux ordres :

- Les mesures éducatives ou de placement énumérées à l'article 770 du CPP

- La détention préventive dont les modalités sont définies à l'article 771 du CPP.

Existerait-il une troisième catégorie de mesures provisoires notamment une ordonnance de garde provisoire dans une maison d'arrêt ? Quel en serait le fondement juridique ?

Notre opinion sur cette question ne souffre d'aucune ambiguïté. Il n'existe aucune disposition sur l'enfance délinquante dans le code ivoirien de procédure pénale prévoyant une ordonnance de garde provisoire dans une maison d'arrêt. La lecture de l'article 771 du CPP qui dispose que le mineur âgé de plus de treize ans ne peut être placé provisoirement dans une maison d'arrêt par le juge des enfants, que si cette mesure paraît indispensable ou encore s'il est impossible de prendre toutes autres dispositions doit se faire en rapport avec l'article 769 alinéa 3 du CPP qui dispose que le juge des enfants peut décerner tous mandats utiles (mandat d'amener457, de comparution458 , d'arrêt459 , de dépôt460) en observant les règles de droit commun à savoir la procédure et les conditions de délivrance de chaque mandat.

Eu égard au principe de la primauté des mesures éducatives et de réinsertion socioprofessionnelle sur les mesures privatives de liberté admis en matière d'enfance délinquante, l'article 771 a pour objectif de préciser les modalités d'application de la détention préventive en la matière.

Si l'usage du terme « placé provisoirement » dans le contexte spécifique de l'enfance délinquante peut prêter à confusion, elle n'autorise nullement à admettre qu'il s'agisse, d'une catégorie sui generis de titre de placement. Dans le langage courant, il est bien admis d'utiliser l'expression « placé sous mandat de dépôt ». Certes, dans la pratique l'absence de centre d'observation dans la plupart des juridictions oblige à prendre une ordonnance de garde provisoire en confiant l'inculpé au régisseur de la maison d'arrêt. Mais, c'est une

457 CORNU (G.), Vocabulaire juridique, 10e éd. mise à jour, PUF, Paris, 2014, p.637.

458 CORNU (G.), Vocabulaire juridique, 10e éd. mise à jour, PUF, Paris, 2014, p.637.

459 CORNU (G.), Vocabulaire juridique, 10e éd. mise à jour, PUF, Paris, 2014, p.637.

460 CORNU (G.), Vocabulaire juridique, 10e éd. mise à jour, PUF, Paris, 2014, p.638.

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pratique qui n'a aucun fondement légal et est la résultante du dysfonctionnement et des insuffisances du système judiciaire et pénitentiaire dans son ensemble. Le bénéfice de l'excuse absolutoire de minorité acquis de droit au mineur de 13 ans, excluant l'application de toute peine d'emprisonnement, ce dernier ne devrait en aucun cas être placé sous mandat de dépôt même en cas de prévention de crime , cela est une incohérence au regard du droit international.

Une autre situation incohérente réside au niveau des délais de la détention. Lorsque le juge des enfants décerne un mandat de dépôt contre un mineur, il doit s'en référer aux conditions de droit commun édictées aux articles 137 à 150 du CPP qui détermine les durées de détention en fonction de la nature de l'acte et de la peine encourue ; le législateur n'a prévu aucune disposition dérogatoire en faveur des enfants ; or il est admis par les conventions internationales que le mineur doit être détenu le moins longtemps possible. Cette situation de droit commun appliquée au mineur en détention préventive est anachronique avec l'article 114 alinéa 1 du code pénal qui réduit le quantum des peines prononcées contre le mineur. Il doit être prévu à l'égard du mineur des délais de détention moins longs, une limitation du nombre de prolongation du mandat de dépôt dans le cadre de l'application de l'article 138 alinéa 3 du CPP.

En tout état de cause, toutes les parties impliquées dans le suivi et le règlement des dossiers des mineurs doivent scrupuleusement respecter les délais de détention prévus dans le code de procédure pénale.

Pour conclure sur le point précis, des titres de placement du mineur, il est souhaitable que le législateur en fasse une relecture afin que les termes utilisés ne souffrent d'aucune ambiguïté, et le contenu des textes débarrassé de toute incohérence.

Considérant la clôture de l'information, les diligences faites, le juge des enfants peut soit d'office à la requête du ministère public communiquer le dossier à ce dernier (article 772 CPP). La communication du dossier au parquet est-elle une mesure facultative ou obligatoire ? Le juge des enfants peut-il sans provoquer le réquisitoire du parquet ordonner le renvoi de l'inculpé devant les juridictions de jugement notamment devant le tribunal pour enfants ?

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A cette question alors que les parquets répondent par la négative, les juges des enfants admettent bien une telle possibilité. En effet, cette disposition spéciale de l'article 772 du CPP déroge à la règle générale de l'article 175 al 2 du CPP énoncée en ces termes : « ...dès le retour de la procédure au juge d'instruction, celui-ci s'il estime que la procédure est en état, la transmet au Procureur de la République qui doit lui adresser ses réquisitions au plus tard dans les 10 jours de sa réception ». L'application effective des dispositions de l'article 772 pourrait être une solution au non règlement dans les délais impartis des dossiers communiqués au parquet. Au demeurant, elle ne préjudicie pas aux intérêts du ministère public, partie au procès pénal dûment représentée à l'audience de tribunal pour enfants, le tribunal ne délibère qu'après avoir entendu le parquet en ses réquisitions.

Pour assurer une meilleure protection des enfants délinquants et harmoniser la législation ivoirienne aux normes internationales protectrices des droits de l'enfant, il serait utile que soit adoptée une révision du chapitre relatif à l'enquête préliminaire du code de procédure pénale afin d'intégrer des dispositions spécifiques aux mineurs. Cette réforme pourrait mettre en avant le caractère exceptionnel du recours à la garde à vue pour tout enfant, à n'utiliser qu'en dernier ressort, et pour une durée non renouvelable de maximum 48 heures. Elle pourrait en outre prévoir que les interrogatoires des mineurs par les officiers de police judiciaire (OPJ) auraient lieu en présence des parents du mineur, de son tuteur ou, à défaut, de tout autre adulte qualifié pour représenter le mineur. Cet adulte qualifié, à définir par la loi, pourrait être un assistant social, un avocat commis d'office, et à défaut, un juriste ou para-juriste payé par une ONG en accord avec le Ministère de la justice (à l'image de ce qui se fait couramment dans de nombreux pays africains comme en Afrique du Sud, au Malawi etc.) ou un défenseur choisi par le juge parmi les personnes présentant toutes les garanties désirables comme le prévoit déjà l'Article 770 CPP, al.2.

Un autre point qu'il nous parait important d'affronter dans le cadre de ce chapitre est celui de la déjudiciarisation des litiges concernant les mineurs délinquants. En effet, la CIDE insiste sur la nécessité « de prendre des mesures, chaque fois que cela est possible et souhaitable, pour traiter ces enfants sans recourir à la procédure judiciaire461 ». Ce concept est repris à l'article 11 des règles de Beijing qui précise que le recours à des moyens

461 Article 40 (3) b) de la Convention relative aux droits de l'enfant.

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extrajudiciaires « exige le consentement de l'intéressé ou de ses parents ou de son tuteur462 » et que « cette pratique permet d'éviter les conséquences négatives d'une procédure normale dans l'administration de la justice pour mineurs (par exemple le stigmate d'une condamnation et d'un jugement)463 ».

Le code de procédure pénale ivoirien ne prévoit pas de moyens de résolution extrajudiciaire des litiges concernant les mineurs délinquants. Il exclut d'ailleurs expressément qu'on puisse recourir à la transaction pénale pour les infractions commises par les mineurs464. Depuis plusieurs années, le BICE tente néanmoins d'encourager le recours à la conciliation pour régler les litiges de faible gravité impliquant les mineurs à travers l'intervention de ses délégués présents auprès des différents commissariats d'Abidjan. Devant l'absence d'une réglementation spécifique et en vue d'harmoniser la législation ivoirienne aux normes internationales protectrices des droits de l'enfant, il nous parait très important que le législateur intervienne afin d'autoriser le recours à des moyens extrajudiciaires pour traiter les infractions de faible gravité commises par des mineurs délinquants, moins protégés que les enfants victimes dont les bourreaux s'exposent à l'application à leur encontre d'un cadre juridique répressif des violations des droits de l'enfant .

B. UNE REPRESSION PENALE DES AUTEURS DE VIOLATIONS DES DROITS DE L'ENFANT

Le Code pénal ivoirien a été institué par la loi 81-640 du 30 juillet 1981. Nombre d'articles de ce code protègent l'enfant par l'interdiction de certains comportements à son égard. Il s'agit de comportements qui portent atteinte à son intégrité physique et morale et à sa liberté. Mieux, il définit les peines relatives aux crimes et délits commis à l'endroit des enfants. Tel, il s'agit en principe d'un texte particulièrement protecteur des droits de l'enfant.

Le rôle protecteur des droits de l'enfant par le code pénal n'est plus à contester. Ainsi, par exemple, lorsque le code pénal réprime le meurtre d'un enfant, on sait qu'il cherche à protéger par ce biais son droit à la vie. De même, lorsque ce texte de protection particulière

462 Article 11.3 des Règles de Beijing.

463 Article 11 des règles de Beijing.

464 Article 8 du code de procédure pénale ivoirien.

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réprime l'infraction d'arrestation arbitraire, c'est la liberté individuelle ou collective qui se trouve ainsi protégée. Et ainsi de suite.

En ce qui a trait aux peines applicables lors d'infractions perpétrés envers les mineurs, les articles 334,336, et 360 prévoient que les peines peuvent être portées au double dans les situations d'atteinte à la moralité publique, de prostitution, d'outrage public à la pudeur impliquant des mineurs. L'article 337 précise en outre qu'est puni d'un emprisonnement de 2 à 5 ans et d'une amende de 500,000 à 5,000,000 de francs CFA, quiconque attente aux moeurs excitant ou favorisant ou facilitant la débauche ou la corruption de la jeunesse de l'un ou l'autre sexe au-dessous de l'âge de 18 ans.

De surcroit, l'article 354 prévoit une peine d'emprisonnement de 5 à 25 ans dans le cas de viol ; la peine d'emprisonnement à vie peut cependant être prescrite si la victime est mineure de 15 ans ou si l'auteur du viol est le père, un ascendant, une personne ayant autorité sur la victime, s'il est chargé de son éducation, de sa formation intellectuelle ou professionnelle. L'article 355 précise quant à lui que les amendes et les peines d'emprisonnement prévues dans le cas d'attentat à la pudeur consommé ou tenté avec violence doublent quasiment si la victime est âgée de moins de 15 ans ou si son auteur est la mère , le père ou un ascendant , ou une personne ayant une autorité sur la victime, s'il est chargé de son éducation, de sa formation intellectuelle ou professionnelle. Les articles 357 et 358 énoncent les peines encourues dans les cas d'attentat à la pudeur, consommé ou tenté sans violence, ou d'acte impudique ou contre nature commis sur une personne incapable de se protéger en raison de son état mental ou physique.

En plus de ces articles, le chapitre 3 intitulé les crimes et délits contre les enfants et les personnes incapables de se protéger en raison de leur état physique et mental465 fait mention d'autres peines prévues, cette fois-ci, en cas d'infanticide, des voies de fait et/ou de violences, d'abandon d'enfant, d'avortement, et finalement d'enlèvement de mineur.

Finalement l'article 376 prévoit qu'en cas d'en cas d'aliénation de la liberté d'une tierce personne, un maximum de la peine (10 ans d'emprisonnement et une amende de 5, 000,000

465 Articles 361 à 372 : L'infanticide, une incrimination des atteintes au droit à la vie (Article 361 Code pénal), L'exploitation sexuelle/ Le proxénétisme (Article 335, 336 code pénal) ; Les mineurs victimes de violences physiques (violences et voies de fait : Article 362 Code pénal) ;Les mineurs victimes de violences sexuelles (viol, attentat à la pudeur : Article 355 à 356 ; outrage public à la pudeur sur mineur article 360) ; La répression de la non déclaration de l'accueil des mineurs victimes de maltraitance.

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de francs CFA) est toujours prononcé si la victime est âgée de moins de 15 ans. L'article 377 présente l'amende et la peine d'emprisonnement prévues si une personne met ou reçoit d'une tierce personne en gage, la peine étant plus sévère si la victime est âgée de moins de 15 ans. L'article 378 porte sur les peines encourues si quiconque contraint un mineur de 18 ans à entrer dans une union matrimoniale de nature coutumière ou de nature religieuse ou si quiconque impose à autrui un travail ou un service par lequel il ne s'est pas offert de son plein gré , et ce, dans le but de satisfaire exclusivement son intérêt personnel. L'article 386 traite des cas d'atteinte à l'état civil d'un enfant et établit les gammes de peines d'emprisonnements prévues quant à ce délit.

Bref, pour être de lourdes peines, ces peines vont des mesures privatives de liberté à la prison à vie, voir la peine de mort466. Ces incriminations sanctionnées par le code pénal ivoirien, sont une autre façon de protéger quelques droits de l'enfant limitativement pris en charge par le droit pénal.

Cependant, à cause de la rigueur du principe légaliste qui domine le droit pénal, on ne peut pas dire que tous les droits de l'enfant, surtout, ceux dont la violation n'est pas sanctionnée pénalement, sont pris en charge par cette branche spécifique du droit. Il en va ainsi de la violation du droit à l'éducation qui n'est pas pénalement sanctionné en Côte d'Ivoire. Il en découle que la protection pénale des droits de l'enfant, n'est que sélective.

Toutefois, en dépit de cet aspect sélectif, le rôle symbolique de protection des droits de l'enfant, assuré par le code pénal, ne peut être contesté. Le droit pénal étant un maillon de la chaine ; elle n'est pas la chaine tout entière.

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