A. UN CADRE PENAL HYBRIDE APPLICABLE AUX MINEURS
DELINQUANTS
A l'instar de la France, qui fut la première a
adopté une loi sur « l'enfance délinquante »
en 1945447, la Côte d'Ivoire, ancienne colonie
française s'est elle aussi intéressée à la question
de ces enfants ou du moins, n'a fait que lui emboiter le pas. C'est dans cet
élan, que quelques articles du code pénal et du code de
procédure pénale, font mention de protection de l'enfant en
conflit avec la loi. Plus précisément, deux lois, la loi n°
69-371 du 12/08/1969 relative au code pénal et celle n° 81-640 du
31/07/1981 relative au code de procédure pénale, consacre un
titre entier à l'enfance délinquante.
446 Celui-ci est protégé par la loi de 1981 du
code pénal ivoirien, qui assure une protection générale
à tout individu et spécifiquement à l'enfant. Ce dernier
bénéficie à cet effet, lui aussi de toute la protection
prévue par le droit pénal. Il jouit d'une protection juridique et
judiciaire qui doit respecter ses droits et ses intérêts en toute
situation et circonstance comme prévu par la Déclaration
Universelle des droits de l'Homme en son article 25 alinéa 2. La loi
pénale ivoirienne prévoit une protection accrue aux enfants
victimes de violences, lorsqu'il se trouve en danger moral et social.
447 BOHUE (Y.), La protection pénale de l'enfant en
droit ivoirien, thèse présentée et soutenue
publiquement le 7 mars 1992 à l'Université nationale de
Côte d'Ivoire, faculté de droit, p.6.
187
Le caractère hybride du cadre pénal applicable
aux mineurs est perceptible à travers l'affirmation d'une
responsabilité pénale des mineurs peu ou prou conforme aux normes
internationales (1) et l'application de règles de droit commun aux
mineurs dans le cadre de l'enquête préliminaire (2).
1. Une responsabilité pénale des mineurs
peu ou prou conforme aux normes internationales
Aux termes de l'article 14 du code pénal ivoirien,
« est mineure au sens de la loi pénale, toute personne
âgée de moins de 18 ans lors de la commission de l'infraction
».
Il appert de cet article que la minorité constitue une
cause d'exclusion ou d'atténuation de la responsabilité
pénale. L'âge de 18 ans fixé par le législateur
ivoirien comme seuil maxima au-delà duquel une personne n'est plus
considérée comme un mineur est en adéquation avec les
dispositions de la Convention relative aux droits de l'enfant448 et
de la Charte africaine des droits et du bien-être de
l'enfant449.
L'article 40 de la CDE prévoit qu'à ce seuil
maxima de responsabilité pénale
corresponde un seuil minima. L'article 4.1 des règles de Beijing ajoute
que ce seuil d'âge ne doit pas être fixé trop bas, eu
égard au manque de maturité affective, psychologique et
intellectuelle du jeune mineur. Un tel seuil d'irresponsabilité
pénale des mineurs a aussi été prévu dans
l'article4.1 des Règles de Beijing ainsi que dans l'article 17.4 de la
Charte Africaine sur les droits et le bien-être de l'enfant. L'article
11.a des RPMPL, ne fixe aucun critère relatif à la
détermination de ce seuil par le législateur de chaque
État. Il laisse ce dernier libre de fixer ce seuil en fonction de ses
réalités sociales.
L'interprétation de l'article 757 alinéa 3 du
Code de procédure pénale (CPP) ivoirien laisse entendre que ce
n'est qu'à partir de 13 ans que le mineur est suffisamment conscient des
actes qu'il pose pour être susceptible de se voir appliquer une sanction
pénale.
448 La Convention relative aux droits de l'enfant a
été adoptée par l'Assemblée générale
des Nations Unies le 20 Novembre 1989. Elle a été ratifiée
par la Côte d'Ivoire en date du 4 février 1991. L'article 1
établit qu'un « enfant s'entend de tout être humain
âgé de moins de dix-huit ans, sauf si la majorité est
atteinte plus tôt en vertu de la législation qui lui est
applicable ».
449 L'article 2 de la charte Africaine sur les droits et le
bien-être de l'enfant.
188
Cependant, cette limite d'âge fixée à 13
ans constitue t'elle le seuil minima de responsabilité
pénale ? Si l'on lie la responsabilité pénale à
l'administration d'une peine, ce seuil d'âge de moins de 13 ans constitue
effectivement le seul minima de responsabilité pénale.
Cependant, l'article 771 al.2 du CPP dispose que les mineurs âgés
de moins de 13 ans seront susceptibles d'être détenus
préventivement s'ils sont soupçonnés d'avoir commis un
crime.
Sur le critère lié à la tranche
d'âge, le code pénal ivoirien procède à une
catégorisation des mineurs ; ainsi, il précise, en son article
116 que :
« - les faits commis par un mineur de 10
ans450 ne sont pas susceptibles de qualification et de poursuites
pénales ;
- Le mineur de 13 ans bénéficie de droit, en
cas de culpabilité, de l'excuse absolutoire de
minorité451 ;
- Les mineurs de 10 à 13 ans ne peuvent faire l'objet
que des mesures de protection, d'assistance, de surveillance et
d'éducation prévues par la loi ;
- L'excuse atténuante452 ou absolutoire de
minorité bénéficie aux mineurs de 16 à 18 ans dans
les conditions prévues par le code de procédure
pénale. »
Il appert de cet article, que seuls les mineurs de moins de 10
ans sont totalement exempts de toute responsabilité pénale. Quant
aux mineurs dont l'âge oscille entre 10 et 13 ans, ils devront
répondre de leurs actes devant une juridiction ; cette juridiction
saisie, ne pourra que prononcer des mesures de protection, d'assistance, de
surveillance et d'éducation qui sont prévues à l'article
783 du code de procédure pénale, à l'exclusion de toute
condamnation pénale. Même si cette catégorie de mineurs ne
peut être sanctionnée par une peine, réservée aux
mineurs âgés de plus de 13 ans, l'existence de mécanismes
éducatifs pouvant être actionnés à leur égard
par un juge, démontre la possibilité pour une juridiction de
reconnaître
450 Pour éviter toute confusion quant à
l'interprétation de l'article 116 du code pénal, relevons que
selon l'article 14 du code pénal, « les mineurs de 10, 13 et 16 ans
sont ceux qui n'ont pas atteint ces âges lors de la commission de
l'infraction ». Il s'agit donc des mineurs de moins de 10, 13 et 16 ans et
non pas de 10, 13 et 16 ans accomplis comme on pourrait le croire à la
première lecture.
451 Au sens de l'article 10 du code pénal (Livre
premier), une excuse absolutoire consiste en « toute raison limitativement
prévue et définie par la loi et dont l'admission, sans faire
disparaitre l'infraction, entraine une dispense ou une exemption de peine.
».
452 Au sens de l'article 10 du code pénal (Livre
premier), une excuse atténuante consiste « en toute raison
limitativement prévue et définie par la loi et dont l'admission,
sans faire disparaître l'infraction, entraine une atténuation
obligatoire par la peine encourue ».
189
la responsabilité pénale des mineurs de moins de
13 ans. Cependant, dans l'hypothèse où un mineur de 13 ans est
poursuivi pour crime453, il peut faire l'objet d'un placement
provisoire dans une maison d'arrêt par ordonnance motivée du juge
des enfants. Quant aux mineurs âgés de plus de 13 ans, ils peuvent
être poursuivis et condamnés pénalement.
Il convient de faire quelques précisions : la
convention relative aux droits de l'enfant454, la Charte Africaine
des droits et du bien-être de l'enfant455 accorde aux
États, la latitude de déterminer l'âge minimum au-dessous
duquel les enfants seront présumés n'avoir pas la capacité
d'enfreindre la loi pénale. Toutefois, bien que non contraignantes, les
règles de Beijing456, règles nécessaires au nom
de l'intérêt supérieur de l'enfant, établissent que
le seuil de responsabilité pénale « ne doit pas
être fixé trop bas eu égard aux problèmes de
maturité affective, psychologique et intellectuelle ». En
fixant le seuil de responsabilité pénale à 10 ans et en
prévoyant l'octroi de mesures protection, d'assistance, de surveillance
et d'éducation à l'égard des mineurs de 10 à 13
ans, le législateur ivoirien fait montre de cohérence avec les
principales dispositions internationales en la matière, et ce ,
contrairement à l'enquête préliminaire marqué par
une application de règles de droits commun aux mineurs.
2. Une application de règles de droit commun
aux mineurs dans le cadre de l'enquête préliminaire
Le code de procédure pénale ivoirien ne contient
pas de dispositions spécifiquement applicables aux mineurs dans le cadre
de l'enquête préliminaire. Celle menée par la police
judiciaire devant faire l'objet de développements particuliers dans le
cadre de développements ultérieurs, nous examinerons ici quelques
données textuelles prévues dans le cadre de l'information
judiciaire.
453 Article 771 du code de procédure pénale
ivoirien.
454 L'article 40 de la Convention relative aux droits de
l'enfant établit que « les Etats parties s'efforcent(...)
d'établir un âge minimum au-dessous duquel les enfants seront
présumés n'avoir pas la capacité d'enfreindre la loi
pénale ».
455 L'article 1 (4) de la Charte Africaine des droits et du
bien-être de l'enfant établit qu'un « âge minimal doit
être fixé en deçà duquel les enfants sont
présumés ne pas avoir la capacité d'enfreindre la loi
pénale ».
456 Article 4.1 de l'ensemble de règles minima des
Nations Unies concernant l'administration de la justice pour mineurs
(Règles de Beijing) adoptées par l'Assemblée
générale des Nations Unies le 29 novembre 1985. Ces règles
de protection des mineurs sont des recommandations formulées par
l'Assemblée générale des Nations Unies et elles n'ont
aucune force contraignante à l'égard des Etats.
190
Commençons par les mesures restrictives de
liberté à caractère provisoire prises au cours de
l'information. Elles sont de deux ordres :
- Les mesures éducatives ou de placement
énumérées à l'article 770 du CPP
- La détention préventive dont les
modalités sont définies à l'article 771 du CPP.
Existerait-il une troisième catégorie de mesures
provisoires notamment une ordonnance de garde provisoire dans une maison
d'arrêt ? Quel en serait le fondement juridique ?
Notre opinion sur cette question ne souffre d'aucune
ambiguïté. Il n'existe aucune disposition sur l'enfance
délinquante dans le code ivoirien de procédure pénale
prévoyant une ordonnance de garde provisoire dans une maison
d'arrêt. La lecture de l'article 771 du CPP qui dispose que le mineur
âgé de plus de treize ans ne peut être placé
provisoirement dans une maison d'arrêt par le juge des enfants, que si
cette mesure paraît indispensable ou encore s'il est impossible de
prendre toutes autres dispositions doit se faire en rapport avec l'article 769
alinéa 3 du CPP qui dispose que le juge des enfants peut décerner
tous mandats utiles (mandat d'amener457, de
comparution458 , d'arrêt459 , de
dépôt460) en observant les règles de droit
commun à savoir la procédure et les conditions de
délivrance de chaque mandat.
Eu égard au principe de la primauté des mesures
éducatives et de réinsertion socioprofessionnelle sur les mesures
privatives de liberté admis en matière d'enfance
délinquante, l'article 771 a pour objectif de préciser les
modalités d'application de la détention préventive en la
matière.
Si l'usage du terme « placé provisoirement
» dans le contexte spécifique de l'enfance délinquante
peut prêter à confusion, elle n'autorise nullement à
admettre qu'il s'agisse, d'une catégorie sui generis de titre
de placement. Dans le langage courant, il est bien admis d'utiliser
l'expression « placé sous mandat de dépôt
». Certes, dans la pratique l'absence de centre d'observation dans la
plupart des juridictions oblige à prendre une ordonnance de garde
provisoire en confiant l'inculpé au régisseur de la maison
d'arrêt. Mais, c'est une
457 CORNU (G.), Vocabulaire juridique, 10e
éd. mise à jour, PUF, Paris, 2014, p.637.
458 CORNU (G.), Vocabulaire juridique, 10e
éd. mise à jour, PUF, Paris, 2014, p.637.
459 CORNU (G.), Vocabulaire juridique, 10e
éd. mise à jour, PUF, Paris, 2014, p.637.
460 CORNU (G.), Vocabulaire juridique, 10e
éd. mise à jour, PUF, Paris, 2014, p.638.
191
pratique qui n'a aucun fondement légal et est la
résultante du dysfonctionnement et des insuffisances du système
judiciaire et pénitentiaire dans son ensemble. Le bénéfice
de l'excuse absolutoire de minorité acquis de droit au mineur de 13 ans,
excluant l'application de toute peine d'emprisonnement, ce dernier ne devrait
en aucun cas être placé sous mandat de dépôt
même en cas de prévention de crime , cela est une
incohérence au regard du droit international.
Une autre situation incohérente réside au niveau
des délais de la détention. Lorsque le juge des enfants
décerne un mandat de dépôt contre un mineur, il doit s'en
référer aux conditions de droit commun édictées aux
articles 137 à 150 du CPP qui détermine les durées de
détention en fonction de la nature de l'acte et de la peine encourue ;
le législateur n'a prévu aucune disposition dérogatoire en
faveur des enfants ; or il est admis par les conventions internationales que le
mineur doit être détenu le moins longtemps possible. Cette
situation de droit commun appliquée au mineur en détention
préventive est anachronique avec l'article 114 alinéa 1 du code
pénal qui réduit le quantum des peines prononcées contre
le mineur. Il doit être prévu à l'égard du mineur
des délais de détention moins longs, une limitation du nombre de
prolongation du mandat de dépôt dans le cadre de l'application de
l'article 138 alinéa 3 du CPP.
En tout état de cause, toutes les parties
impliquées dans le suivi et le règlement des dossiers des mineurs
doivent scrupuleusement respecter les délais de détention
prévus dans le code de procédure pénale.
Pour conclure sur le point précis, des titres de
placement du mineur, il est souhaitable que le législateur en fasse une
relecture afin que les termes utilisés ne souffrent d'aucune
ambiguïté, et le contenu des textes débarrassé de
toute incohérence.
Considérant la clôture de l'information, les
diligences faites, le juge des enfants peut soit d'office à la
requête du ministère public communiquer le dossier à ce
dernier (article 772 CPP). La communication du dossier au parquet est-elle une
mesure facultative ou obligatoire ? Le juge des enfants peut-il sans provoquer
le réquisitoire du parquet ordonner le renvoi de l'inculpé devant
les juridictions de jugement notamment devant le tribunal pour enfants ?
192
A cette question alors que les parquets répondent par
la négative, les juges des enfants admettent bien une telle
possibilité. En effet, cette disposition spéciale de l'article
772 du CPP déroge à la règle générale de
l'article 175 al 2 du CPP énoncée en ces termes : «
...dès le retour de la procédure au juge d'instruction,
celui-ci s'il estime que la procédure est en état, la transmet au
Procureur de la République qui doit lui adresser ses réquisitions
au plus tard dans les 10 jours de sa réception ».
L'application effective des dispositions de l'article 772 pourrait être
une solution au non règlement dans les délais impartis des
dossiers communiqués au parquet. Au demeurant, elle ne préjudicie
pas aux intérêts du ministère public, partie au
procès pénal dûment représentée à
l'audience de tribunal pour enfants, le tribunal ne délibère
qu'après avoir entendu le parquet en ses réquisitions.
Pour assurer une meilleure protection des enfants
délinquants et harmoniser la législation ivoirienne aux normes
internationales protectrices des droits de l'enfant, il serait utile que soit
adoptée une révision du chapitre relatif à l'enquête
préliminaire du code de procédure pénale afin
d'intégrer des dispositions spécifiques aux mineurs. Cette
réforme pourrait mettre en avant le caractère exceptionnel du
recours à la garde à vue pour tout enfant, à n'utiliser
qu'en dernier ressort, et pour une durée non renouvelable de maximum 48
heures. Elle pourrait en outre prévoir que les interrogatoires des
mineurs par les officiers de police judiciaire (OPJ) auraient lieu en
présence des parents du mineur, de son tuteur ou, à
défaut, de tout autre adulte qualifié pour représenter le
mineur. Cet adulte qualifié, à définir par la loi,
pourrait être un assistant social, un avocat commis d'office, et à
défaut, un juriste ou para-juriste payé par une ONG en accord
avec le Ministère de la justice (à l'image de ce qui se fait
couramment dans de nombreux pays africains comme en Afrique du Sud, au Malawi
etc.) ou un défenseur choisi par le juge parmi les personnes
présentant toutes les garanties désirables comme le
prévoit déjà l'Article 770 CPP, al.2.
Un autre point qu'il nous parait important d'affronter dans le
cadre de ce chapitre est celui de la déjudiciarisation des litiges
concernant les mineurs délinquants. En effet, la CIDE insiste sur la
nécessité « de prendre des mesures, chaque fois que cela
est possible et souhaitable, pour traiter ces enfants sans recourir à la
procédure judiciaire461 ». Ce concept est repris
à l'article 11 des règles de Beijing qui précise que le
recours à des moyens
461 Article 40 (3) b) de la Convention relative aux droits de
l'enfant.
193
extrajudiciaires « exige le consentement de
l'intéressé ou de ses parents ou de son tuteur462
» et que « cette pratique permet d'éviter les
conséquences négatives d'une procédure normale dans
l'administration de la justice pour mineurs (par exemple le stigmate d'une
condamnation et d'un jugement)463 ».
Le code de procédure pénale ivoirien ne
prévoit pas de moyens de résolution extrajudiciaire des litiges
concernant les mineurs délinquants. Il exclut d'ailleurs
expressément qu'on puisse recourir à la transaction pénale
pour les infractions commises par les mineurs464. Depuis plusieurs
années, le BICE tente néanmoins d'encourager le recours à
la conciliation pour régler les litiges de faible gravité
impliquant les mineurs à travers l'intervention de ses
délégués présents auprès des
différents commissariats d'Abidjan. Devant l'absence d'une
réglementation spécifique et en vue d'harmoniser la
législation ivoirienne aux normes internationales protectrices des
droits de l'enfant, il nous parait très important que le
législateur intervienne afin d'autoriser le recours à des moyens
extrajudiciaires pour traiter les infractions de faible gravité commises
par des mineurs délinquants, moins protégés que les
enfants victimes dont les bourreaux s'exposent à l'application à
leur encontre d'un cadre juridique répressif des violations des droits
de l'enfant .
B. UNE REPRESSION PENALE DES AUTEURS DE VIOLATIONS DES
DROITS DE L'ENFANT
Le Code pénal ivoirien a été
institué par la loi 81-640 du 30 juillet 1981. Nombre d'articles de ce
code protègent l'enfant par l'interdiction de certains comportements
à son égard. Il s'agit de comportements qui portent atteinte
à son intégrité physique et morale et à sa
liberté. Mieux, il définit les peines relatives aux crimes et
délits commis à l'endroit des enfants. Tel, il s'agit en principe
d'un texte particulièrement protecteur des droits de l'enfant.
Le rôle protecteur des droits de l'enfant par le code
pénal n'est plus à contester. Ainsi, par exemple, lorsque le code
pénal réprime le meurtre d'un enfant, on sait qu'il cherche
à protéger par ce biais son droit à la vie. De même,
lorsque ce texte de protection particulière
462 Article 11.3 des Règles de Beijing.
463 Article 11 des règles de Beijing.
464 Article 8 du code de procédure pénale
ivoirien.
194
réprime l'infraction d'arrestation arbitraire, c'est la
liberté individuelle ou collective qui se trouve ainsi
protégée. Et ainsi de suite.
En ce qui a trait aux peines applicables lors d'infractions
perpétrés envers les mineurs, les articles 334,336, et 360
prévoient que les peines peuvent être portées au double
dans les situations d'atteinte à la moralité publique, de
prostitution, d'outrage public à la pudeur impliquant des mineurs.
L'article 337 précise en outre qu'est puni d'un emprisonnement de 2
à 5 ans et d'une amende de 500,000 à 5,000,000 de francs CFA,
quiconque attente aux moeurs excitant ou favorisant ou facilitant la
débauche ou la corruption de la jeunesse de l'un ou l'autre sexe
au-dessous de l'âge de 18 ans.
De surcroit, l'article 354 prévoit une peine
d'emprisonnement de 5 à 25 ans dans le cas de viol ; la peine
d'emprisonnement à vie peut cependant être prescrite si la victime
est mineure de 15 ans ou si l'auteur du viol est le père, un ascendant,
une personne ayant autorité sur la victime, s'il est chargé de
son éducation, de sa formation intellectuelle ou professionnelle.
L'article 355 précise quant à lui que les amendes et les peines
d'emprisonnement prévues dans le cas d'attentat à la pudeur
consommé ou tenté avec violence doublent quasiment si la victime
est âgée de moins de 15 ans ou si son auteur est la mère ,
le père ou un ascendant , ou une personne ayant une autorité sur
la victime, s'il est chargé de son éducation, de sa formation
intellectuelle ou professionnelle. Les articles 357 et 358 énoncent les
peines encourues dans les cas d'attentat à la pudeur, consommé ou
tenté sans violence, ou d'acte impudique ou contre nature commis sur une
personne incapable de se protéger en raison de son état mental ou
physique.
En plus de ces articles, le chapitre 3 intitulé les
crimes et délits contre les enfants et les personnes incapables de se
protéger en raison de leur état physique et mental465
fait mention d'autres peines prévues, cette fois-ci, en cas
d'infanticide, des voies de fait et/ou de violences, d'abandon d'enfant,
d'avortement, et finalement d'enlèvement de mineur.
Finalement l'article 376 prévoit qu'en cas d'en cas
d'aliénation de la liberté d'une tierce personne, un maximum de
la peine (10 ans d'emprisonnement et une amende de 5, 000,000
465 Articles 361 à 372 : L'infanticide, une
incrimination des atteintes au droit à la vie (Article 361 Code
pénal), L'exploitation sexuelle/ Le proxénétisme (Article
335, 336 code pénal) ; Les mineurs victimes de violences physiques
(violences et voies de fait : Article 362 Code pénal) ;Les mineurs
victimes de violences sexuelles (viol, attentat à la pudeur : Article
355 à 356 ; outrage public à la pudeur sur mineur article 360) ;
La répression de la non déclaration de l'accueil des mineurs
victimes de maltraitance.
195
de francs CFA) est toujours prononcé si la victime est
âgée de moins de 15 ans. L'article 377 présente l'amende et
la peine d'emprisonnement prévues si une personne met ou reçoit
d'une tierce personne en gage, la peine étant plus sévère
si la victime est âgée de moins de 15 ans. L'article 378 porte sur
les peines encourues si quiconque contraint un mineur de 18 ans à entrer
dans une union matrimoniale de nature coutumière ou de nature religieuse
ou si quiconque impose à autrui un travail ou un service par lequel il
ne s'est pas offert de son plein gré , et ce, dans le but de satisfaire
exclusivement son intérêt personnel. L'article 386 traite des cas
d'atteinte à l'état civil d'un enfant et établit les
gammes de peines d'emprisonnements prévues quant à ce
délit.
Bref, pour être de lourdes peines, ces peines vont des
mesures privatives de liberté à la prison à vie, voir la
peine de mort466. Ces incriminations sanctionnées par le code
pénal ivoirien, sont une autre façon de protéger quelques
droits de l'enfant limitativement pris en charge par le droit pénal.
Cependant, à cause de la rigueur du principe
légaliste qui domine le droit pénal, on ne peut pas dire que tous
les droits de l'enfant, surtout, ceux dont la violation n'est pas
sanctionnée pénalement, sont pris en charge par cette branche
spécifique du droit. Il en va ainsi de la violation du droit à
l'éducation qui n'est pas pénalement sanctionné en
Côte d'Ivoire. Il en découle que la protection pénale des
droits de l'enfant, n'est que sélective.
Toutefois, en dépit de cet aspect sélectif, le
rôle symbolique de protection des droits de l'enfant, assuré par
le code pénal, ne peut être contesté. Le droit pénal
étant un maillon de la chaine ; elle n'est pas la chaine tout
entière.
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