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la déconcentration de la gestion foncière au Cameroun: une analyse du décret numéro 2005/481 du 16 décembre 2005

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par Willy TADJUDJE
Université de Yaoundé II - Soa - DEA 2005
  

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SECTION 2 - LES EFFETS DE LA PROVINCIALISATION 

DE LA PROCEDURE D'IMMATRICULATION

Avec la provincialisation de la procédure d'immatriculation opérée par le décret de 2005, plusieurs maux qui existaient dans l'ancienne procédure ont tout simplement été bannis. Elle permet de faire l'économie des très longues procédures, des rejets fantaisistes, de l'obligation d'«aller suivre le dossier à Yaoundé», etc.. En tout cas, aujourd'hui, les délais sont raccourcis et les procédures en principe plus accélérées83(*) (§1), ce qui contribue à la démystification de l'obtention du titre foncier (§2).

§1 - Le raccourcissement des délais et l'accélération de la procédure d'immatriculation

Parler du raccourcissement des délais dans l'actuelle procédure d'immatriculation revient à affirmer que des délais plus courts y ont été prévus par rapport à l'ancienne (A). Cette mesure concourt amplement à la redynamisation de la procédure, à son accélération (B), incitant par là les autochtones à plus de demandes d'immatriculation.

A - Le raccourcissement des délais de la procédure d'immatriculation : les nouveaux délais prévus par le décret de 2005

En matière de délais, il convient de distinguer selon qu'il s'agit de l'imposition de nouveaux délais ou alors du raccourcissement de ceux qui existaient déjà. En ce qui concerne cette dernière catégorie, le décret no 2005/481 innove en deux points précis. D'abord, à l'article 12 (nouveau), le sous-préfet a huit jours pour transmettre le dossier à la DDDAF alors que l'article 12 du décret de 1976 lui accordait quinze jours pour transmettre ce même dossier à la section départementale des domaines territorialement compétente. Egalement, l'article 13 alinéa 1 (nouveau) prévoit que dès réception du dossier d'immatriculation, que le délégué départemental des Affaires Foncières fasse publier dans les 15 jours qui suivent, par le chef de service départemental des affaires foncières, un extrait de la demande par voie d'affichage84(*), alors que l'article 13 du décret de 1976 fixe un délai plus long d'un mois pour effectuer cette même publication.

Quant aux nouveaux délais imposés, deux d'entre eux ont pu en être identifiés. D'une part, l'article 12 (2) (nouveau) accorde un délai de 72 heures au sous-préfet ou au chef de district pour délivrer au demandeur de titre foncier, le récepissé attestant la réception de son dossier d'immatriculation à la sous-préfecture ou dans les bureaux du chef de district. D'autre part, en vertu des dispositions de l'article 13 (3) (nouveau), lorsqu'il y a plusieurs demandes de titre foncier, le sous-préfet ou le chef de district doit établir chaque mois, un calendrier des travaux de la commission consultative. Dans le décret de 1976, ces deux activités du sous-préfet ou du chef de district n'étaient pas encadrées dans des délais. Cette fixation de nouveaux délais est une initiative à encourager dans la mesure où elle oblige les autorités compétentes à agir avec plus de diligence.

Néanmoins, les décideurs auraient pu prévoir des sanctions en cas de non respect des délais. En effet, il est évident que si les délais de l'ancienne procédure étaient clairement identifiés85(*), il aurait été possible que des titres fonciers puissent être établis en mois d'un an. Aussi, il est vrai qu'un autre élément perturbateur était la centralisation de la procédure, puis qu'il fallait tenir compte des longues durées de transmission et de gestion des dossiers86(*), mais les lenteurs étaient plus dues au fait que les délais n'étaient véritablement pas observés.

Quoi qu'il en soit, lorsqu'une autorité agit sans contrainte, elle est toujours vouée à évoluer sans tenir compte du temps. C'est la raison pour laquelle l'aménagement juste et ordonné de sanctions dans cette perspective pourrait valoir tout son pesant d'or si tant est que la solution réelle du problème des délais se trouve dans la capacité des intervenants à agir promptement et avec efficacité, donc dans l'accélération de la procédure.

B - L'accélération de la procédure d'immatriculation : ses impacts sur l'usager

L'actuelle procédure d'immatriculation se distingue de la précédente par l'obligation des intervenants à agir avec plus de promptitude. Toutefois, leur rapidité peut avoir des impacts aussi bien négatifs (1) que positifs (2) sur l'usager.

1 - L'impact négatif

L'accélération de la procédure d'immatriculation n'est pas toujours favorable étant donné qu'il est possible que les droits de certaines personnes soient lésés sur le terrain à immatriculer87(*) en raison cette rapidité. Au cours des descentes effectuées sur le terrain, on a pu noter que certaines revendications ont été introduites alors que le titre foncier avait déjà été établi. Cette rapidité peut donc, à quelques égards, s'avérer dangereuse et préjudiciable, sans oublier qu'elle peut entraîner des formes d'escroquerie foncière, donc paradoxalement l'insécurité foncière que veulent éviter les décideurs. Sans doute, nul n'est-il sensé ignorer la loi  ou ne peut-il se prévaloir en justice de sa propre turpitude. Mais, pour que cette maxime s'applique judicieusement, il faudrait une publication adéquate de la législation, dans le cas d'espèce de la procédure d'immatriculation.

Par ailleurs, sur le terrain, on a pu relever que certains agents ne sont pas toujours très contents de l'accélération de la procédure d'immatriculation. En effet, lorsqu'ils n'y ont pas d'intérêts particuliers88(*), ils trouvent facilement des alibis pour ne pas se rendre sur le terrain. C'est le plus souvent le cas en saison pluvieuse dans les localités peu ou mal viabilisées. C'est également le cas lorsque le géomètre déclare faussement des erreurs, dans la levée topographique, de nature à justifier un retour sur le terrain, etc.

Faute de s'entendre avec les dissidents sur ces faux problèmes, et surtout avec la crainte de les dénoncer, le requérant peut se retrouver avec des incidents, dans la procédure, devant nécessiter par conséquent un long délai pour la publication de l'avis de clôture de bornage (un mois) au Bulletin des Avis Domaniaux et Fonciers89(*). Encore qu'il y a des localités où il existe une sorte de complicité entre les responsables administratifs et certains chefs traditionnels en matière d'immatriculation. Mais, cette complicité ne doit pas toujours être peinte en noir car, elle peut également être analysée comme étant une façon de tisser des partenariats afin de mieux gérer la terre.

2 - L'impact positif

Positivement, l'accélération de la procédure encourage les usagers à introduire plus de demandes d'immatriculation. Dans les DDDAF, une expression est employée pour qualifier les titres fonciers obtenus après six mois, conformément aux dispositions prévues par le décret de 2005 : c'est le  titre de la réforme.

Dans toutes les conservations foncières où nous nous sommes rendu, nous avons relevé l'existence de ces titres de la réforme90(*). Certes, on ne peut pas avancer des chiffres très exacts, mais force est de constater qu'ils deviennent de plus en plus nombreux. A titre d'exemple, l'on peut se féliciter de cette quantification effectuée par M. André Marie NDONGO lorsqu'il affirme avoir « obtenu de très bons résultats, en l'occurrence la délivrance de quelques 5100 titres fonciers en deux ans de service », ce qui, ajoute-t-il « est une performance, comparativement à ce qui se faisait antérieurement »91(*). Ce chiffre n'est pas surprenant pour une délégation départementale comme celle du Mfoundi où a été remarquée une affluence particulière des usagers sollicitant l'obtention d'un titre foncier. Ce constat est également valable pour les autres délégations visitées92(*). Quoi qu'il en soit, cette promptitude n'est pas absolue, puis qu'il peut arriver, et il survient d'ailleurs des cas où une procédure dure plus qu'il ne le faille93(*).

Le raccourcissement des délais et la rapidité de la nouvelle procédure d'immatriculation permettent aux usagers d'obtenir rapidement leur titre foncier, contrairement à l'ancienne où il fallait attendre parfois plusieurs années pour parvenir au même résultat. Son obtention relevait alors d'un mythe et la procédure actuelle l'a tout simplement démystifiée, tout en démystifiant également son aboutissement, c'est-à-dire le titre foncier.

* 83 MINTAMACK (E B), Ibidem.

* 84 L'affichage se fait dans les locaux de la DDDAF, dans les services de la sous-préfecture, du chef de district et à la chefferie du village concerné.

* 85 Sur la question des lenteurs dans cette procédure, lire TJOUEN (A-D),  op. cit., pp. 158 et s..

* 86 Aujourd'hui, en plus de raccourcir considérablement les délais, les compétences sont désormais partagées (lire NJOMGANG (H), « Enjeux et perspectives d'une réforme foncière au Cameroun (décret no 2005/481 du 16 décembre 2005) », www.mindaf.gov.cm).

* 87 De façon générale, en ce qui concerne les effets pervers que peut entraîner le décret de 2005, voir GOUDEM (J), Cours de régime foncier, 3e année de licence, Université de Yaoundé II, Faculté des Sciences Juridiques et Politiques, 2006/2007 et 2007/2008, inédits.

* 88 Il arrive que les agents des domaines et affaires foncières agissent plus pour leurs intérêts égoïstes que dans l'intention de poursuivre une véritable mission de service public ( voir CS/CA, jugement no 76/04-05 du 27 avril 2005, affaire YONGO Marc c/ Etat du Cameroun  (MINUH) et DELANGUE KOLOKO Michel (intervenant volontaire) : « Attendu que dans son procès-verbal versé dans ce dossier, (...) sieur EBOA Joseph avait introduit une demande d'immatriculation du terrain litigieux qui s'était heurtée à l'opposition du recourant YONGO Marc et, qu'en 1985, déjouant cette opposition, DELANGUE KOLOKO Michel, grand frère de EBOA, a introduit une nouvelle demande d'immatriculation du même terrain qui a abouti, avec la complicité d'un agent des Domaines d'Edéa et natif de Mouanko, au titre foncier no 2333/SM grâce à un constat d'occupation clandestin et à un bornage fictif »).

* 89 Lire PIERMAY (J-L), « Naissance et évolution d'une ville post-coloniale : Mbuji-Mayi (Zaïre), acteurs et enjeux fonciers », in CROUSSE (B), LEBRIS (E), LE ROY (E), Espaces disputés en Afrique noire, Pratiques foncières locales, Karthala, Paris, 1986, pp. 133-144.

* 90 Lire ONANA (R), « Mise en application des réformes sur l'obtention du titre foncier », Domaines Infos, no 002, mars 2006, p. 4.

* 91 NDONGO (A M), Délégué départemental des Domaines et des Affaires foncières du Mfoundi à Yaoundé, La nouvelle presse, no 320 du lundi 29 octobre 2007, p. 8.

* 92 Voir cette liste en annexe B-2, p. X, a la fin du mémoire.

* 93 Voir titre 2, chapitre 1, infra.

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"Ceux qui vivent sont ceux qui luttent"   Victor Hugo