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Le gage-espèces

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par Fouad HAMIDI
Université Paris I - Master 2 Recherche Droit patrimonial approfondi 2006
  

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CONCLUSION

185. Nature juridique - Cette brève étude du gage-espèces a eu pour vocation principale de redonner à la volonté des parties la place qu'il lui revient.

186. L'analyse classique : un fondement naturaliste - La théorie classique donne une analyse du gage-espèces en se fondant sur la nature juridique de son objet et le classifie ainsi entre plusieurs catégories juridiques : gage translatif de propriété, gage de monnaie fiduciaire, nantissement de créance, nantissement de monnaie scripturale. Dans cette vision des choses, selon le mode de dépossession et le type de support monétaire affecté en garantie, les parties se trouvent face à plusieurs régimes juridiques distincts, compliquant ainsi la vie des affaires. La limite est fragile entre une dépossession directe (entre les mains du créancier ou sur son compte) et indirecte (compte d'affectation spéciale). Le fondement invoqué est aussi préjudiciable pour les parties : la fongibilité compromet autant le droit de propriété du constituant que celui du créancier gagiste. Cette analyse ne permet pas un changement dans l'assiette de la sûreté hormis si les parties ou le législateur prévoient une subrogation réelle entre les éléments aliénés et les éléments substitués.

Le fondement de cette classification n'est pas préjudiciable qu'au niveau pratique mais aussi au niveau théorique. Assigné à la fongibilité ou la consomptibilité des biens, la justification du transfert du droit de propriété au profit du créancier « gagiste » est contraire aux modes d'acquisitions de la propriété. De plus, la solution apportée n'est pas si certaine : un vendeur se réservant la propriété d'un bien fongible peut exercer une revendication en nature. Le bénéficiaire d'une sûreté sur sommes d'argent dans le cadre des dispositions nouvelles relatives aux garanties financières peut être autorisé à aliéner ces sommes sans recevoir la qualité de propriétaire.

Cette analyse était justifiée par deux séries de motifs : l'identification de l'assiette de la garantie et le pouvoir de disposer. En analysant, l'assiette de la sûreté à partir des « choses fongibles » remises en garantie au créancier, le gage-espèces allait dans une impasse : l'assiette devenait incertaine ainsi que le droit de propriété qui était incorporé. En analysant l'acte d'aliénation comme un acte de disposition, le créancier devenait par confusion - comme en matière d'usufruit - un propriétaire souverain et absolu. Devant exercer l'abusus pour aliéner les unités monétaires, il faut en faire un propriétaire.

187. L'analyse renouvelée : un fondement volontariste - Nous avons alors tenté une analyse renouvelée du gage-espèces à partir de la seule volonté des parties. Nous sommes passés par une institution ancienne et remise au goût du jour par la doctrine179(*) et la jurisprudence : l'universalité. Cette institution est nécessaire, utile et unifiante pour le gage-espèces.

Tout d'abord, elle est un passage obligé en raison de la qualité de choses de genre de la monnaie. Ces choses nécessitent de recourir à l'universalité pour donner au contrat de gage-espèces une assiette certaine. Ce recours permet alors aux parties de ne pas être surprise. Si elles décident de conclure un contrat de nantissement et la fongibilité des éléments contenus dans l'universalité n'y changeront rien : la sûreté ne dégénérera pas en sûreté-propriété « en raison de la nature fongible » de son objet. L'affectation donnée à l'universalité lors de sa création et confirmée lors de la conclusion du contrat de nantissement lui donne une identité propre. Ainsi, les parties auront des droits sur une chose individualisée et déterminée.

Ensuite, l'universalité permet une vision dynamique du gage-espèces : l'entrée et la sortie d'éléments contenus n'affecte pas l'objet certain du contrat et partant des droits respectifs des parties. La théorie moderne du droit de propriété et du droit des biens joue son rôle dans le gage-espèces. La souveraineté du propriétaire permet de créer une propriété spéciale : la propriété fiduciaire. Ainsi, le gage-espèces peut alors constituer une fiducie-sûreté non pas sur le fondement de la nature de son objet mais de la volonté des parties. Toutefois, il faudra pour cela de la « volonté » : admettre que la propriété fiduciaire puisse exister sans intervention du législateur et permettre un transfert de propriété à titre de garantie. L'association de l'universalité, de la théorie moderne de la propriété et de la liberté contractuelle restaure un fondement adéquat à la classification des sûretés conventionnelles sur l'argent. On passe ainsi d'un fondement naturaliste (analyse classique) à un fondement volontariste (analyse proposée). Dès lors la nature juridique du gage-espèces est calquée sur la volonté des parties : la volonté et la réalité juridique concordent en toute harmonie.

188. Le régime juridique - Cette association se retrouve aussi dans le régime juridique de ces sûretés tant au cours de vie de la sûreté qu'au moment de sa réalisation.

189. Avant la réalisation de la sûreté - La combinaison de la théorie de l'universalité et de la théorie moderne de la propriété permet une organisation des pouvoirs et obligations des parties sur l'assiette de la sûreté. La nature duale de l'universalité permet une mouvance dans sa composition sans compromettre l'existence de la sûreté dont elle en est l'objet. La rénovation de la théorie de la propriété permet l'aliénation des unités monétaires sans créer une division de la propriété. Concernant le nantissement, une conception objective de la possession permet une mouvance dynamique. En analysant la possession non pas subjectivement (corpus et animus domini) mais objectivement (possessio naturalis ou possession naturelle), il est permis de voir dans les actes d'aliénation des éléments contenus non pas comme des actes de disposition mais comme des actes d'administration. La théorie classique de la propriété ne le permettait pas : il fallait être titulaire du droit de propriété incorporé dans la chose pour le détruire. La conception objective de la possession ainsi qu'une analyse différenciée de la propriété, et partant, de la distinction des actes d'administration et de disposition le permettent. La contrepartie nécessaire de ce pouvoir d'aliéner les unités monétaires contenues dans l'universalité est l'obligation de remplacement. Au titre de son obligation de conservation de la substance de l'objet gagé, le créancier devra remplacer les unités monétaires aliénées selon les critères d'intégration voulus par les parties. Il les remplacera par des biens objectivement ou subjectivement équivalents. La fongibilité des unités monétaires supposera préalablement leur consomptibilité, c'est-à-dire que le constituant autorise le créancier à aliéner les unités monétaires. La fongibilité ne justifie pas la consomptibilité. C'est la consomptibilité qui appelle la fongibilité.

Concernant la fiducie-sûreté, le créancier peut aliéner les unités monétaires - sur le fondement de son pouvoir de disposition - à charge de les remplacer. Il a une obligation d'entretien qui lui impose de maintenir la valeur de l'universalité. A la différence du créancier nanti, il a aussi un pouvoir de disposition sur l'universalité elle-même. Il peut effectuer des actes de disposition en conformité avec les stipulations contractuelles.

190. La réalisation du gage-espèces - La nature particulière de l'objet de la convention du gage-espèces, la monnaie, facilite sa réalisation. En matière de nantissement, le créancier pourra, si la convention le permet, s'approprier soit les éléments contenus - en présence d'une pluralité de nantissement - soit l'universalité. Au titre du principe de non-enrichissement du fait de la sûreté, il devra rendre l'excédent si la valeur de l'universalité est supérieure à celle de la dette garantie. En matière de fiducie-sûreté, la réalisation est aussi simplifiée. Le créancier devient propriétaire à titre définitif en cas d'inexécution de la dette garantie. Il est dispensé de son obligation de donner. En vertu du même principe de non-enrichissement, il devra restituer l'excédent de valeur au constituant.

191. Ouverture - Pourrait-on parler de « gage-espèce » au lieu de « gage-espèces » ?

Le passage du pluriel au singulier permettrait alors d'étendre une recherche à toutes les sûretés sur choses consomptibles et fongibles. Le droit français contient plusieurs exemples : le warrant de marchandises, le gage de compte d'instruments financiers, le gage-espèces, le gage de stocks de marchandises...A l'heure actuelle, elles ont toutes des régimes juridiques propres et disparates. L'universalité pourrait constituer un point de départ pour élaborer un régime juridique commun à ce type de sûretés. Cette étude n'aurait pas qu'un intérêt national - c'est-à-dire unifier le régime juridique des nantissements (ou gages) sur choses consomptibles et fongibles - mais aussi international. Elle pourrait aussi permettre, à notre avis, une efficacité de certaines sûretés étrangères, et plus particulièrement la floating-charge.

SOMMAIRE

INTRODUCTION........................................................................................1

1ère PARTIE : LA NATURE JURIDIQUE DU GAGE-ESPECES 9

CHAPITRE I : L'ANALYSE CLASSIQUE DU GAGE-ESPECES FONDEE SUR LA QUALIFICATION JURIDIQUE DE SON OBJET 11

SECTION I / LA NATURE JURIDIQUE DU GAGE-ESPECES EN L'ABSENCE DU MAINTIEN DE L'INDIVIDUALITE DE SON ASSIETTE : UNE SURETE TRANSLATIVE DE PROPRIETE 11

SECTION II / LA NATURE JURIDIQUE DU GAGE-ESPECES EN PRESENCE D'UN MAINTIEN DE L'INDIVIDUALITE DE SON ASSIETTE : UNE SURETE NON-TRANSLATIVE DE PROPRIETE 37

CHAPITRE II : L'ANALYSE RENOUVELEE DU GAGE-ESPECES FONDEE SUR LA VOLONTE DES PARTIES 48

SECTION I / L'UNIVERSALITE : L'OBJET CERTAIN DES SURETES SUR L'ARGENT 50

SECTION II / L'UNIVERSALITE : UNE INSTITUTION RESTAURATRICE DE LA VOLONTE DES PARTIES 60

2ème PARTIE / LE REGIME JURIDIQUE DU GAGE-ESPECES. 70

CHAPITRE I / LES DROITS ET OBLIGATIONS DES PARTIES AVANT LA REALISATION DE LA SURETE 71

SECTION I / LES DROITS ET OBLIGATIONS DES PARTIES EN PRESENCE D'UN TRANSFERT FIDUCIAIRE A TITRE DE GARANTIE 71

SECTION II/ LES DROITS ET OBLIGATIONS DES PARTIES EN PRESENCE D'UN NANTISSEMENT 78

CHAPITRE II : LES DROITS ET OBLIGATIONS DES PARTIES AU MOMENT DE LA REALISATION DU GAGE-ESPECES 91

SECTION I / LA REALISATION DU GAGE-ESPECES EN PRESENCE D'UN NANTISSEMENT 91

SECTION II : LA REALISATION DU GAGE-ESPECES EN PRESENCE D'UNE SURETE FIDUCIAIRE 97

CONCLUSION....................................................................................... 101.

TABLES DES MATIERES........................................................................ 105

BIBLIOGRAPHIE....................................................................................107

* 179 C. KUHN, Le patrimoine fiduciaire - Contribution à l'étude de l'universalité, Thèse Paris I, sous la direction du Professeur Thierry REVET - R. LIBCHABER R., Le portefeuille de valeurs mobilières : bien unique ou pluralités de biens ?, Rép. Defrénois 1997, art.36464, p.65-91 - F. ZENATI, Universalités, note sous 1ère Civ. 12 novembre 1998 « Baylet », RTD Civ. 1999, p.422 et s. - Th. REVET, Usufruit d'universalité, note sous 1ère Civ. 3 décembre 2002 « Baylet », RTD Civ. 2003, p.118 et s. - Th. REVET, Revendication des choses fongibles, note sous Com. 5 mars 2002 « Du Buit », RTD Civ. 2002, p.327 et s.

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"L'imagination est plus importante que le savoir"   Albert Einstein